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            Les opiacés | 
         
         
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             Pavot  
            
            Il existe une seule espèce de pavot capable de produire 
              de l'opium, Papaver somniferum, dont on connaît au moins une 
              quarantaine de variétés qui poussent sur tous les 
              continents. Les caractéristiques de certaines d'entre elles 
              sont recherchées en fonction de certains usages : pour les 
              graines, utilisées dans la pâtisserie ou pour faire 
              de l'huile; pour extraire de l'opium destiné à la 
              fabrication de morphine et d'héroïne; pour la fabrication 
              de morphine en partant directement de la paille sèche de 
              pavot et des capsules sèches non incisées...  
            
              - Papaver somniferum, album, glabrum, et setigerum. Appelé 
                aussi pavot blanc d'Orient. C'est la variété la 
                plus communément cultivée pour l'extraction de l'opium. 
                Les fleurs et les graines sont blanches.
 
              - Papaver somniferum nigrum. Dans certaines régions d'Europe 
                et d'Asie, il existe, pour en extraire l'huile et parfois l'opium, 
                des cultures de Papaver somniferum nigrum, dont les fleurs sont 
                d'un rouge violacé et les graines noires. 
 
             
            
            
            Cocaïer  
            
              - Coca Huànuco ou Bolivienne (Erythroxylum coca 
                var. coca) : sa zone géographique s'étend de l'Équateur 
                jusqu'au nord de l'Argentine sur le flanc est de la cordillère 
                des Andes, dans des zones humides, entre 500 et 1500 m, voire 
                2000 m, dans certaines régions. Cette variété 
                est très prisée pour ses feuilles à "mâcher" 
                (acullicu) mais représente également une part importante 
                de la coca destinée au marché de la cocaïne.
 
              -  Coca Trujillo (Erythroxylum novogranatense var. truxillense) 
                : plus adaptée à un climat aride, cette variété 
                s'est développée sur la côte Pacifique depuis 
                l'Équateur jusqu'au Chili durant la période des 
                Incas. Actuellement, elle n'est cultivée que sur la côte 
                péruvienne. Les plantations actuelles approvisionnent la 
                firme Coca-Cola, pour environ 700 t par an. En effet, cette variété, 
                peu intéressante pour la production de cocaïne du 
                fait de son contenu plus faible en alcaloïde, connut néanmoins 
                beaucoup de succès au XIXème siècle pour 
                la fabrication de vins et tonics du fait de sa richesse en essences 
                aromatiques.
 
              - Coca Colombienne (Erythroxylum novogranatense var. novogranatense) 
                : cette variété supporte des conditions climatiques 
                plus sèches. Elle se cultive dans les vallées centrales 
                des Andes colombiennes et le long de la côte des Caraïbes. 
                Durant la période pré-hispanique, elle s'étendait 
                jusqu'au Venezuela, l'Amérique centrale et les Caraïbes. 
                Elle est désignée sous le nom de hayo et yaat. Le 
                nom khoka qui signifie arbuste en aymara n'a été 
                généralisé à l'ensemble du continent 
                que sous l'empire espagnol. Elle continue à être 
                cultivée et à faire l'objet d'un usage traditionnel 
                en Colombie dans la zone du Cauca, par l'ethnie Paez, et dans 
                la Sierra Nevada de Santa Marta par l'ethnie Arhaucos.
 
              - Coca Ipadu (Erythroxylum coca var. coca) : découverte 
                plus récemment, au milieu du XIXème siècle, 
                elle est cultivée depuis en Amazonie brésilienne, 
                en particulier par les Tukanu de l'Alto Rio Negro. 
 
             
            
            
            Les dérivés de la coca  
            
            
              - Pâte base de cocaïne (PBC) : première 
                étape dans la fabrication du chlorhydrate de cocaïne, 
                la pâte base est en fait un précité des alcaloïdes 
                de la feuille de coca, sous forme de sels. Mélangée 
                à du tabac, elle est fumée sous le nom de basuco.
 
              - Chlorhydrate de cocaïne (ou cocaïne HCI) : 
                plus connu sous le nom de cocaïne ou coke, le chlorhydrate 
                de cocaïne est la poudre obtenue par une suite de réactions 
                chimiques qui permettent d'isoler le principe actif de la coca. 
                Le chlorhydrate de cocaïne peut être inhalé 
                (sniffé) ou injecté.
 
              - Cocaïne à base libre : la cocaïne à 
                base libre (pure à près de 100%) est obtenue par 
                raffinage de la pâte base de cocaïne ou du chlorhydrate 
                dans le but d'obtenir des cristaux fumables. Les deux formes les 
                plus couramment fabriquées sont le free-base et le crack. 
              
 
             
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            Le cannabis  | 
         
         
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             Cannabis sativa, ou chanvre indien : herbe annuelle dioïque 
              (mâle et femelle sur des plants séparés), aux 
              feuilles découpées et palmées. Elle forme, 
              avec le houblon, Humulus lupulus, le genre des cannabinacées. 
              L'espèce est caractérisée par une forte plasticité 
              génétique et compte plus d'une centaine de variétés 
              dans le monde. Selon les latitudes, l'aspect de la plante comme 
              ses concentrations en principes actifs, les cannabinoïdes, 
              varient fortement, au point que certains auteurs ont cru pouvoir 
              distinguer deux sous-espèces: 
            
              - Cannabis sativa sativa, dont les pieds atteignent 3m 
                de hauteur, faiblement active, cultivée pour ses fibres 
                et ses graines dont on extrait de l'huile et qui servent de nourriture 
                pour oiseaux, le chènevis.
 
              - Cannabis sativa indica, aux pieds courts et touffus, 
                à résine plus riche en cannabinoïdes, cultivée 
                dans les régions chaudes.
 
             
            Au nord du 30éme parallèle, les plants du cannabis 
              sont généralement considérés comme du 
              chanvre à fibres. Cependant, cette règle n'est en 
              rien absolue : les microclimats sont nombreux. Dans le Midwest américain, 
              l'analyse des plants de chanvre textile "échappés" 
              des champs proches et retournés à l'état sauvage 
              a montré un niveau très élevé de principe 
              actif, de 2,3 à 7,1% de THC... Par ailleurs, le cannabis 
              s'adapte par sélection naturelle aux conditions de sol, de 
              climat et de traitement qu'il rencontre. La sélection peut 
              s'effectuer sur des plants issus de semences importées et 
              par croisement. 
            Sinsemilla : variété femelle obtenue par hybridation 
              pour la production de marijuana. Elle est cultivée essentiellement 
              au Mexique, aux États-Unis et aux Pays-Bas. Sa teneur en 
              principe actif est très supérieure à la moyenne 
              : alors que le chanvre à fibres ne contient que 0,1% de THC 
              et les meilleures plantes à résine aux alentours de 
              10%, la sinsemilla américaine dépasse couramment 20% 
              de THC et son homologue hollandaise, la Nederwiet, atteint 40%. 
             
            
            
            Principes actifs 
            
            Outre quelques 61 cannabinoïdes identifiés, le cannabis 
              contient plus de 300 composants chimiques. La très grande 
              complexité de leur interaction fait du cannabis une des plantes 
              les plus rétives à la synthèse biochimique. 
            
              - THC, ou L-9-tétrahydrocannabinol : principe le 
                plus psychoactif du cannabis, isolé en 1964. Il peut parfois 
                respecter jusqu'à 90% des cannabinoïdes présents 
                dans la plante. On le trouve surtout dans la résine des 
                poils glandulaires des feuilles, des tiges et surtout des sommités 
                fleuries.
 
              - CBD, ou cannabidiol : cet autre cannabinoïde n'est 
                pas psychoactif dans sa forme pure. Il a des effets sédatifs, 
                analgésiques et antibiotiques. Son interaction avec le 
                THC en potentialise les effets dépresseurs et en limite 
                les effets euphoriques, tout en allongeant la durée d'action 
                des effets psychoactifs. Les plants les plus résineux en 
                possèdent un taux élevé. 
 
             
            
            
            Marijuana et dérivés 
            
            
              - Marijuana : nom générique donné 
                à "l'herbe" de cannabis. On l'appelle kif au 
                Maroc, et ganja en Inde. Les feuilles et les tiges de la plante 
                sont séchées puis broyées pour être 
                fumées, pures ou mélangées à du tabac.
 
              - Haschich ou résine de cannabis : de couleur verdâtre, 
                brun-beige ou noire, elle est raclée sur les feuilles sommitales 
                ou obtenue sous forme de poudre en secouant les plants séchés. 
                Chauffée et compressée, elle est conditionnée 
                sous forme de blocs ou plaquettes. Les indiens l'appellent charas. 
                Au Maroc, la poudre de résine s'appelle chira. Sa teneur 
                moyenne en THC varie de 6% (Maroc) à 25% (Pakistan, Afghanistan). 
                Les plants les plus résineux sont issus de semences de 
                Tchécoslovaquie, du Liban, du Maroc, d'Afghanistan, du 
                Pakistan et du Népal et contiennent généralement 
                plus de CBD que de THC. Ces variétés permettent 
                d'obtenir un haschisch de niveau élevé, en puissance 
                comme en quantité, mais une marijuana, sauf exception, 
                de faible qualité. Le cannabis mexicain produit très 
                peu de résine mais une herbe réputée. Ces 
                différences expliquent en grande partie que, par l'extension 
                du marché de consommation dans les années 60, ces 
                différentes régions se soient spécialisées, 
                soit en haschich, soit en marijuana.
 
              - L'huile de cannabis est un dérivé extrêmement 
                concentré, obtenu par distillation d'un mélange 
                de haschich et d'alcool pharmaceutique. Il est surtout employé 
                au Moyen-Orient. En Colombie, sa production pour l'exportation 
                est à l'origine d'une relance des cultures de cannabis 
                qui occupaient de 8 à 10 000 ha en 1995. 
 
             
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            Les drogues de synthèse  | 
         
         
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             Designer drugs (drogues à la carte) : variantes de 
              psychotropes soumis à un contrôle. Leurs producteurs 
              modifient légèrement la structure chimique d'une substance 
              illicite de manière à obtenir une molécule 
              nouvelle, aux effets similaires, qui ne pourra tomber sous le coup 
              de la loi qu'une fois identifiée et inscrite sur la liste 
              des drogues contrôlées. 
            Opiacés de synthèse : produits, généralement 
              fabriqués à partir de sous-produits du goudron, de 
              la houille et du pétrole, ayant des propriétés 
              analgésiques similaires à la morphine.  
            Buprénorphine et méthadone : principaux substituts 
              de l'héroïne utilisés dans le traitement de la 
              toxicomanie. 
             Phénylpipéridines : famille de plusieurs 
              milliers d'opiacés de synthèse, parmi lesquels on 
              compte notamment deux groupes : 
            
              - La mépéridine (éthyl-1-méthyl-4-phénylpipéridine-4-carboxylate) 
                et ses dérivés sont commercialisés sous divers 
                noms : MPPP (ou "héroïne synthétique"), 
                MPTP, PEPAP...Ils ont des effets hallucinogènes; 
 
              - Le fentanyl et ses dérivés : puissant analgésique 
                découvert en Belgique, en 1963, par les laboratoires Janssen. 
                Apparu aux États-Unis au début des années 
                70, d'abord pour doper des chevaux de course, il donne naissance 
                à de multiples designer drugs.
 
                Après l'interdiction aux États-Unis en 1981 de l'alphaméthylfentanyl 
                (ou China White), lui succéderont le 3-méthylfentanyl 
                (mille fois plus puissant que l'héroïne) et l'alpha-méthylacétylfentanyl. 
                Le 3-méthylfentanyl est produit aujourd'hui en CEI.  
             
            Amphétamine (et dérivés) : de "a(lpha)-m(éthyl)-ph(ényl)ét(hyl)amine", 
              aminé synthétique dont la structure chimique ressemble 
              à celle des neurotransmetteurs adrénergiques. Effet 
              de stimulation intellectuelle et verbale, masquant les signes de 
              fatigue, le sommeil et la faim. On appelle l'amphétamine 
              et ses dérivés "drogues du travail" ou "cocaïne 
              du pauvre".  
            Environ 2000 dérivés amphétaminiques ont été 
              étudiés.  
            
              - Speed : surnom de sulfate d'amphétamine (ou nenzédrine), 
                la forme la plus simple de ce type de drogue, conditionnée 
                en comprimés.
 
              - Ephédrine : principal alcaloïde des quelque 
                quarante espèces d'arbuste du genre Ephedra, plante utilisée 
                par les Chinois depuis cinq mille ans pour le traitement de l'asthme 
                et comme stimulant. Principal précurseur de la méthamphétamine.
 
              - Méthamphétamine : dérivé 
                amphétaminique aux puissants effets stimulants vendu légalement 
                sous le nom de Pervitine. Synthétisée au 
                Japon en 1919. La forme cristallisée et fumable du chlorydrate 
                de d-méthamphétamine est baptisée ice, shabu, 
                crystal ou crank.
 
              -  Methcatinone (ou "cat") : produit à 
                base d'éphédrine naturelle ou synthétique 
                de structure identique à la méthamphétamine 
                et à la catinone (principe psychoactif du cat ou Cathis 
                edulis, arbres dont les feuilles sont mâchées pour 
                obtenir un effet stimulant au Yémen et dans la Corne d'Afrique). 
                Elle se présente sous forme de poudre qui peut être 
                sniffée, bue, injectée ou fumée avec de la 
                marijuana. Découverte en Allemagne en 1928, utilisée 
                dans le traitement des dépressions en Union Soviétique 
                dans les années 40, puis comme anorexique aux États-Unis 
                après 1957. Des laboratoires clandestins apparaissent en 
                1982 en URSS (Leningrad), où elle est baptisée ephedrone. 
                Aux États-Unis, le marché clandestin se développe 
                à partir du Michigan en 1991.
 
              - Phényléthylamines : famille d'analogues 
                de la mescaline et de l'amphétamine. alexander Shulgin, 
                "inventeur" de l'ecstasy, a décrit la synthèse 
                de 179 d'entre elles. Certaines ont un effet hallucinogène 
                prononcé (2C-B, DOM), d'autres, enfin, combinent effets 
                hallucinogène, stimulant et hypertenseur (MDA, MDMA, MDEA). 
              
 
             
            Classification de la famille des Phényléthylamines 
              : 
            
              - MDA (3,4-méthylènedioxyamphétamine) 
                : surnommée Love Drug ou "pilule de l'amour". 
                Apparu sur le marché illicite de la Côte Ouest des 
                États-Unis en 1968.
 
              - MDMA (3,4- méthylènedioxymétamphétamine) 
                : analogue de la MDA connu sous le nom d'ecstasy, Adam, E, X, 
                XTC... D'abord interdit en Grande-Bretagne en 1977 (en 1985 aux 
                États-Unis).
 
              - MDEA ( 3,4- méthylènedioxéthylamphétamine) 
                : variante de l'ecstasy produite aux Pays-Bas et connue sous le 
                nom de Eve.
 
              - DOM (2,5-diméthoxy-4-méthylamphétamine) 
                ou STP ("sécurité, tranquillité, 
                paix") : un des plus puissants hallucinogènes connus, 
                synthétisé par Alexander Shulgin.
 
              - 2C-B ou Nexus (4-bromo-2,5-diméthoxyphényléthylamine) 
                : hallucinogène apparu en Floride en 1993, puis à 
                Londres. Laboratoires présumés en Afrique du Sud. 
              
 
             
            
            
            Hallucinogènes  
            
            
              - Kétamine : analgésique chirurgical apparu 
                au début des années 90 dans les discothèques 
                new-yorkaises sous le nom de Special K.
 
              - LSD 25 (diéthylamide d'acide lysergique) : dérivé 
                de l'acide lysergique, alcaloïde de l'ergot de seigle. Généralement 
                surnommé "acide" et distribué sous formes 
                de vignettes imprégnées de 20 à 80 mg de 
                produit.
 
              - Phencyclidine (ou PCP) : analgésique médical 
                de la famille des arylcycloalkylamines apparu en 1957. Également 
                appelé Angel Dust ("poussière d'ange"), 
                le PCP a cessé d'être utilisé en 1965, en 
                raison de ses puissants effets hallucinogènes. Converti 
                en tranquillisant vétérinaire, sa production a été 
                prohibée en 1978. Commercialisé sous forme de cigarettes, 
                imprégnées de base diluée dans de l'éther. 
                La pipéridine (voir opiacés de synthèse) 
                sert de précurseur principal dans la fabrication de PCP. 
              
 
             
            Dépresseurs du système nerveux central : il 
              s'agit des tranquillisants, régulateurs d'humeur et somnifères. 
              Ce sont parfois des produits de laboratoires clandestins mais, le 
              plus souvent des médicaments licites détournés 
              de leurs usages thérapeutiques.  
            
              - Barbituriques : produits utilisés en médecine 
                pour leurs propriétés sédatives et hypnotiques. 
                Le sécobarbital, qui entre dans la composition de certains 
                d'entre eux, est classé comme stupéfiant et fait 
                l'objet d'un intense trafic vers l'Afrique.
 
              - Benzodiazépines : principale famille de tranquillisants. 
                Elle comprend notamment le diazépam (Valium), le 
                chlorazépam (Tranxène), le flunizépam 
                (Rohypnol), le temazépam (populaire dans le nord-est 
                de l'Angleterre et à Londres)...
 
              - Méthaqualone : sédatif non barbiturique 
                hypnotique synthétisé en 1951, connu aux États-Unis 
                sous le nom de Quaalude et sous celui de Mandrax, en Afrique australe, 
                où il est consommé avec de l'alcool et de l'herbe 
                de cannabis. 
 
             
           | 
         
         
            
            Les précurseurs chimiques, drogues en puissance | 
         
         
          |  
             Mis à part les dérivés du cannabis et l'opium 
              brut, toutes les drogues sont le résultat d'une transformation 
              qui nécessite quantité de produits chimiques, par 
              exemple :  
              - 1 litre d'anhydride acétique pour produire 1 kg d'héroïne 
               
              - 17 litres d'éther pour 1 kg de chlorydrate de cocaïne. 
             
            Si une vingtaine de produits chimiques peuvent être utilisés 
              dans l'élaboration de la cocaïne, il est virtuellement 
              impossible de dresser une liste limitative des produits entrant 
              dans la composition des drogues synthétiques. Par souci de 
              simplification, nous appellerons toutes ces substances "précurseurs", 
              même si les techniciens opèrent une distinction entre 
              les précurseurs proprement dits, qui entrent dans la composition 
              chimique du produit fini et les matières chimiques essentielles 
              qui sont des réactifs ou solvants utilisés dans le 
              processus d'extraction des alcaloïdes d'une drogue végétale 
              naturelle. 
              La réglementation du commerce international des précurseurs 
              n'est intervenue que tardivement. Ainsi, les gouvernements signataires 
              de la Convention de 1971 sur les substances psychotropes n'ont rien 
              prévu pour les précurseurs de ces drogues synthétiques. 
              Cet "oubli" s'explique largement par l'opposition résolue 
              de l'industrie chimique à toute restriction du commerce. 
            
            
            Les Américains précurseurs du contrôle 
            
            Les Américains, les premiers mettent l'accent sur cette 
              faille du dispositif répressif. Pendant les années 
              70, ils s'efforcent d'obtenir de leurs partenaires dans la "guerre 
              à la drogue" l'adoption de réglementations strictes. 
              En 1979, par exemple, la Thaïlande met en place un contrôle 
              sur les matières essentielles au raffinage de l'héroïne 
              dans le Triangle d'Or. Lorsqu'arrive l'épidémie de 
              consommation de cocaïne, il apparaît rapidement que l'essentiel 
              de l'effort doit porter sur les pays exportateurs de produits chimiques 
              et, au premier chef..., les États-Unis. En 1981, la DEA estime 
              que 40 à 70% des dissolvants exportés par des pays 
              andins sont utilisés dans des laboratoires de clandestins 
              de cocaïne. C'est le cas dans 87% du permanganate de potassium 
              exporté depuis le Texas et la Louisiane vers l'Amérique 
              latine, de 98% de l'éther importé par la Colombie... 
             
            En 1988, le Chemical Division and Trafficking Act entre en vigueur 
              malgré l'opposition des géants de l'industrie américaine, 
              comme Exxon Chemicals ou la Chemical Manufacturers Association. 
              Cette loi fédérale fait obligation aux exportateurs 
              de solliciter de l'administration une autorisation préalable 
              et donne quinze jours à un service spécial, composé 
              d'agents des douanes et de la DEA, pour vérifier la destination 
              finale des substances. Ces nouvelles dispositions auront pour effet, 
              dès les premiers mois d'application, de réduire de 
              moitié les exportations américaines. Toujours sous 
              l'impulsion américaine, un nouveau pas est franchi par la 
              Convention des Nations Unies contre le trafic illicite de stupéfiants 
              et de substances psychotropes de 1988.  
            Elle contient en annexe une liste de 10 précurseurs (portée 
              à 22 en 1992). Ses signataires sont invités à 
              prendre des mesures pour empêcher le détournement de 
              ces matières et à fournir à l'Organe international 
              de contrôle des stupéfiants (OICS) un rapport annuel 
              sur le trafic illicite, les saisies et les méthodes de détournement. 
              Dans le prolongement de la Convention, le Groupe des Sept pays industrialisés 
              crée en 1991, un Groupe d'action chimique (Chemical Action 
              Task Force), présidé par les États-Unis et 
              chargé de définir une politique de coopération. 
              Et l'Union Européenne adopte une directive sur le contrôle 
              des précurseurs par ses membres.  
            
            
            L'Allemagne, plaque tournante du trafic  
            
            La première conséquence de ce forcing américain 
              a été de doper les exportations européennes, 
              particulièrement celle de l'Allemagne, véritable plaque 
              tournante du trafic des précurseurs. 
              Au début des années 80, la firme Bayer fournit déjà 
              80% de l'anhydride acétique utilisé dans les laboratoires 
              d'héroïne d'Asie du Sud-est. En 1989, un an après 
              la nouvelle législation aux États-Unis, les livraisons 
              allemandes à la Colombie augmentent de 433%. 
              En 1990, la DEA se fait un plaisir de dénoncer le rôle 
              joué par Merck Columbia, filiale du cartel chimique qui, 
              au XIXème siècle , avait le premier commercialisé 
              la cocaïne. L'industrie allemande fournit aussi les laboratoires 
              turcs ou les yakuzas japonais. En raison de la facilité avec 
              laquelle y sont accordées les licences d'exportation, l'Allemagne 
              se fait transitaire des produits des autres pays européens. 
              A la fin des années 80, pourtant, la puissante fédération 
              de l'industrie chimique allemande prendra l'initiative de la mise 
              en place d'un contrôle interne sur les activités de 
              ses membres. Ce revirement doit beaucoup à la mise en cause 
              répétée d'industriels d'outre-Rhin dans une 
              série d'affaires désastreuses pour l'image de marque 
              de la profession. Les services secrets américains ont, en 
              effet, multiplié les révélations, photos à 
              l'appui, sur la livraison de produits chimiques aux industries d'armement 
              libyenne ou irakienne. On apprend, par exemple, que la société 
              Imhausen Chemie, accusée de fournir les libyens, fabriquait 
              aussi des comprimés d'ecstasy... 
              L'Allemagne finit par promulguer, en octobre 1994, une "Loi 
              de surveillance de la production et de l'exportation des précurseurs 
              chimiques" qui rend les industriels et leurs négociants 
              responsables de la destination de leurs produits. Tous les pays 
              occidentaux n'ont pas suivi le mouvement : le rapport de l'Organe 
              international de contrôle des stupéfiants pour 1994 
              montrait du doigt la Suisse, accusée d'avoir servi d'intermédiaire 
              pour l'envoi de 50 t d'éphédrine (précurseur 
              des méthamphétamines) tchèque au Mexique. 
            
            
            Le potentiel des industries du Sud 
            
            De fait, la création de contrôles n'a, jusqu'ici, 
              pas sensiblement affecté l'offre mondiale des drogues. A 
              cela plusieurs raisons : les pays industrialisés n'ont pas 
              le monopole de la chimie. Les trafiquants ont pu se retourner vers 
              les pays producteurs les moins avancés (PMA). C'est le cas 
              du Brésil, qui fournit éther et acétone, ou 
              de l'Inde, pour l'anhydride acétique. D'autre part, lorsque 
              le contrôle des échanges commerciaux entre deux pays 
              se fait trop pressant, il est toujours possible d'ouvrir de nouvelles 
              voies d'approvisionnement ou d'installer des laboratoires de transformation 
              près de la source. C'est ainsi que la répression croissante 
              du trafic de drogues synthétiques aux États-Unis entraîne 
              la multiplication des laboratoires au Mexique, que les laboratoires 
              de cocaïne fleurissent au Brésil, ou que les manufactures 
              d'héroïne birmanes migrent de la frontière thaïlandaise 
              à celle de Malaisie, de Chine, ou de l'Inde. Les organisations 
              criminelles impliquées dans la production de drogues s'adaptent 
              constamment aux nouvelles données. Dans le Triangle d'Or, 
              c'est la puissante triade Sun Yee On de Hongkong qui s'est spécialisée 
              dans la fourniture des matières essentielles. Les cartels 
              colombiens, eux, ont de longue date placé des intérêts 
              dans la fabrication ou la distribution des produits pharmaceutiques 
              licites. Ils ont également investi massivement en ex-URSS 
              lors de la privatisation de l'appareil industriel, tout comme la 
              mafia italienne, s'assurant d'ores et déjà le contrôle 
              d'une partie de l'énorme potentiel chimique de l'Est.  
            Reste un dernier écueil : la plupart des matières 
              nécessaires à l'élaboration des drogues ont 
              une multitude d'utilisations licites. Ce qui multiplie les possibilités 
              de détournement et limite a priori les possibilités 
              d'un contrôle exhaustif. Ainsi, en Colombie, dans la région 
              de Puerto Alvira, les paysans qui fabriquent le chlorydrate de cocaïne 
              se procurent des produits chimiques auprès d'employés 
              d'une usine de ... Coca-Cola. 
            De surcroît, la plupart des précurseurs sont, eux-mêmes, 
              des composés qui peuvent être obtenus à partir 
              de produits de base non soumis au contrôle. En 1986 et 1987, 
              la DEA a démantelé en Thaïlande deux laboratoires 
              clandestins qui avaient fabriqué plus d'une tonne d'anhydride 
              acétique. 
            
            
            Précurseurs & Produits chimiques essentiels visés 
              par la Convention de 1988 
            
               
                |  
                   Acide 
                    N-acétylanthranilique  
                 | 
                 
                   Pipéronal 
                    Safrole 
                 | 
               
               
                |  
                   Ephédrine 
                 | 
                 
                    
                    Acide anthranilique  
                 | 
               
               
                |  
                    
                    Ergotamine 
                 | 
                 
                   Acide 
                    phénylacétique  
                 | 
               
               
                |  
                   Méthylénedioxy-3,4 
                    propanone-2  
                 | 
                 
                   Abhydride 
                    actique  
                 | 
               
               
                |  
                   Acide 
                    lysergique 
                 | 
                 
                   Permanganate 
                    de potassium  
                 | 
               
               
                |  
                    
                    Ergométrine  
                 | 
                 
                   Toluène 
                     
                 | 
               
               
                |  
                   Isosafrole 
                     
                 | 
                 
                   Pseudoéphédrine 
                     
                 | 
               
               
                |  
                   Phényl-1 
                    propanone-2  
                 | 
                 
                   Acétone 
                     
                 | 
               
               
                |  
                   Acide 
                    sulfurique  
                 | 
                 
                   Acide 
                    chlorhydrique 
                 | 
               
               
                |  
                   Pipéridine 
                 | 
                 
                   Méthyléthylcétone 
                     
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            Source : Commission des stupéfiants des 
            Nations Unies | 
         
       
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