Article de la revue de presse de la MILDT du 2 Mai 2002
Cosmopolitan consacre plusieurs pages au cannabis et présente
une récente enquête sur le cannabis, l'expertise de l'INSERM
et les recommandations de l'Académie nationale de médecine qui «
met en garde contre toute banalisation ».
51.3% des Français jugent le cannabis « dangereux » tandis
que 33% jugent sa consommation régulière « sans danger ».
Le cannabis est bien une drogue et 78% des Français le reconnaissent.
Si le cannabis ne détruit pas les neurones il altère les facultés
et – « preuves neurobiologiques récentes à l'appui » - il peut provoquer
une dépendance.
Aucun décès ne lui a jamais été attribué, mais « c'est sans
doute que les études n'ont pas pris en compte ses victimes indirectes
: 1000 des 8000 morts annuels sur la route, par exemple ».
La consommation est en constante progression en France : plus d'un
jeune Français sur deux a consommé du cannabis au moins une fois,
deux fois plus que dix ans auparavant et « plus inquiétant, les
consommateurs « réguliers » (d'au moins 20 joints par mois) sont
en constante progression, y compris chez les filles».
Le risque de dépendance au cannabis est moindre que pour d'autres
drogues mais il est réel pour 10 à 15 % de consommateurs et celle-ci
est surtout psychique.
Le Dr Laqueille, psychiatre, explique : « le problème n'est
pas tant cette dépendance physique, très discrète que l'envie incoercible
de consommer. Or, pour la plupart des gens, sans dépendance physique,
il n'y a pas dépendance. Comme pour l'alcool, cette dépendance psychique
est sous-estimée par les consommateurs qui, de ce fait, la banalisent
». Pour les spécialistes, c'est une addiction comme les autres sauf
que, excepté la polyconsommation, elle amène peu de monde à se faire
soigner. Toutefois les comportements changent et le Dr Laqueille
mentionne que depuis quelques années de plus en plus de demandes
d'aide au sevrage sont présentées spécifiquement pour le cannabis
à l'hôpital Sainte-Anne.
Cosmopolitan relève également que « parmi les tentatives de suicide,
il y a plus de consommateurs réguliers de cannabis et, parmi les
consommateurs de cannabis, nettement plus de suicides que dans la
population générale ».
Le THC (principe actif du cannabis) est présent dans des concentrations
toujours plus grandes dans les produits consommés et si celui-ci
n'est pas considéré comme cancérogène ; la fumée de cannabis l'est.
« (…) la concentration en goudrons est 4 fois plus élevée» que
pour la fumée du tabac « (en moyenne 50 mg pour un joint, contre
12 mg pour une cigarette de tabac) mais la concentration en cancérogènes
(nitrosamines, aldéhydes, benzopyrène, benzantracène …), liée aux
produits de coupe – colles, plastiques – est supérieure dans la
fumée du cannabis ».
La question du lien entre fumée du cannabis et schizophrénie n'est
toujours pas tranchée mais il ressort que les chez les fumeurs de
cannabis schizophrènes la psychose apparaît plus tôt et que la prise
en charge médicale est moins bien acceptée par les patients. De
plus, le cannabis peut provoquer des bouffées délirantes proches
des délires schizophréniques.
Enfin, le journal souligne que « une complication trop peu évoquée
du cannabis est qu'elle s'accompagne souvent de la consommation
d'autres produits. » Pour les épidémiologistes, c'est une population
vulnérable et le niveau de consommation est un indicateur de cette
fragilité.
En encadré, Cosmopolitan souligne les dangers avérés de la consommation
de cannabis au volant : « baisse de vigilance, mauvaise apréciation
du temps et de l ‘espace… un joint = 2 verres. Fumer ou conduire,
il faut choisir »
Des clés pour l ’analyse : article de la revue de presse
de la MILDT du 3 Mai 2002
Dans la revue de presse du 02/05/2002, nous avons consacré une
large part de cette dernière à un article paru dans Cosmopolitan
du mois de mai 2002.
Aujourd'hui, en regard du manque de clarté de cet article, nous
souhaitons apporter les précisions suivantes :
Selon les données de l'expertise collective Inserm sur le cannabis
réalisée en 2001 et le dossier de presse y relatif préparé par l'Inserm
:
Pour la dépendance au cannabis, physique et psychologique :
« Le manuel diagnostique et statistique de l'Association américaine
de psychiatrie la décrit comme n'étant pas, en général, de nature
physique. Toutefois un phénomène de tolérance, qui est un des critères
diagnostiques de dépendance physique, est observé chez les consommateurs.
Il se caractérise par le besoin de quantités notablement plus fortes
de substance pour obtenir l'effet recherché. Un syndrome de sevrage,
de faible intensité, a également été décrit.
Des études américaines évaluent aux alentours de 5% la proportion
de sujets présentant, dans la population générale, un risque de
dépendance au cannabis. Dans la population de sujets ayant déjà
consommé, ce risque concernerait 10% des personnes. C'est dans la
tranche d'âge des 15-24 ans que le risque semble le plus élevé.
Par comparaison, et d'après ces mêmes études, ce risque s'élève
à un peu plus de 30% parmi les expérimentateurs de tabac. »
Pour la consommation de cannabis et la sécurité routière :
« Certains effets apparaissant dans les heures qui suivent la prise
de cannabis sont incompatibles avec la conduite automobile : temps
de réaction allongé, capacité amoindrie de contrôle de trajectoire,
mauvaise appréciation du temps et de l'espace, et réponses perturbées
en situation d'urgence. Des études épidémiologiques entreprises
récemment devraient permettre de rendre compte du lien éventuel
existant entre usage de cannabis et accidents de la circulation.
»
Pour le cannabis et les suicides :
« Les patients présentant certains troubles mentaux sont plus fréquemment
consommateurs excessifs de cannabis. Les études trouvent dans les
populations cliniques de patients ayant fait une tentative de suicide
significativement plus de patients abuseurs de substances psychoactives,
dont le cannabis, qu'en population générale. Cette prévalence élevée
des tentatives de suicide est souvent associée à l'existence de
symptômes dépressifs plus importants. »
Pour les taux de concentration de THC :
« Les teneurs en THC des divers produits consommés (herbe, résine,
skunk, pollen) sont très variables. Des concentrations en THC inférieures
à 2% sont relativement fréquentes (18% des échantillons pour l'herbe
comme pour la résine). Depuis 1996, bien que, d'une façon générale,
les teneurs observées dans la majorité des échantillons aient peu
évolué (environ 8% pour l'herbe, et 10% pour la résine), sont apparus
des échantillons très fortement concentrés en THC, jusqu'à 31% pour
la résine et 22% pour l'herbe. En 2000, 3% des échantillons d'herbe
et 18% des échantillons de résine analysés, contenaient ainsi plus
de 15% de THC. »
Pour les goudrons et le THC :
« L'évaluation du potentiel cancérogène d'un usage régulier de
cannabis doit tenir compte de son mode de consommation (associé
au tabac ou fumé sous forme de marijuana ) : la quantité de goudrons
présents dans la fumée d'une cigarette de cannabis (environ 50mg)
est plus élevée que celle que contient une cigarette de tabac (12mg).
(…) Les effets brochodilatateur du THC pourraient favoriser la rétention
de goudrons au niveau de la bouche, du pharynx, de l'œsophage et
du larynx. »
Pour le cannabis et la schizophrénie :
« Certains troubles mentaux peuvent être révélés ou aggravés par
la consommation de cannabis. Ceci a été démontré dans le cas de
la schizophrénie. Les sujets schizophrènes, lorsqu'ils consomment
du cannabis, recourent plus fréquemment aux hospitalisations et
présentent plus de risques de passer à l'acte suicidaire. »
Pour le cannabis et les bouffées délirantes :
« Quelques études menées chez des adultes socialement et affectivement
bien insérés permettent d'affirmer qu'il existe un trouble psychotique
propre à la consommation de cannabis : la psychose cannabique. Elle
se manifeste par des signes proches de ceux des bouffées délirantes
aiguës ; avec une plus grande fréquence des hallucinations, en particulier
visuelles. (…) Un traitement courant par neuroleptique permet de
faire disparaître ce syndrome. La fréquence de la psychose cannabique
semble faible par rapport au nombre de sujets consommateurs. Elle
est estimée à 0,1% dans une étude suédoise. » |