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Étude comparative de la dangerosité des drogues |
Les travaux les plus récents permettent d'établir
un profil pharmacotoxicologique et comportemental pour les différents
produits.
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Constat général sur la toxicité |
I - Une prédisposition biochimique au comportement
abusif se mettrait en place au cours des premiers contacts avec
la drogue.
A ce stade, deux paramètres joueraient un rôle essentiel
: le patrimoine génétique et le contexte socioculturel
et émotionnel. Cela, bien entendu, expliquerait que tous
les individus ne présentent pas la même vulnérabilité
et que c'est la conjonction défavorable de ces deux paramètres
qui faciliterait la " dérive " possible vers l'addiction.
La fréquence de comorbidité psychiatrique dans les
toxicomanies est en faveur de cette hypothèse. Il est donc
souhaitable que des études génétiques soient
développées en France et plus généralement
eu Europe dans ce domaine, actuellement couvert quasi exclusivement
par les États-Unis.
II - Les stress répétés (y compris
durant la gestation) lors de la mise en place des réseaux
neuronaux et la constitution de la personnalité, jouent très
certainement un rôle important dans la vulnérabilité.
C'est la raison pour laquelle un environnement familial et socioculturel
conflictuel dans l'enfance est un facteur de risque de dépendance
particulièrement élevé. Il semble aggravé
par la précocité de la première expérience.
Il est donc souhaitable de mettre en place des modèles animaux
appropriés pour étudier :
- le rôle des stress répétitifs dans la vulnérabilité
à la consommation des différentes drogues;
- l'établissement d'une dépendance et les conditions
conduisant aux rechutes.
III - La consommation de toutes les " drogues "
conduit à une stimulation de la voie dopaminergique mésocorticolimbique.
Toutefois cela n'est pas spécifique aux " drogues "
et il n'existe pas de relation directe entre la libération
de DA dans le système limbique et la " dangerosité
des drogues". C'est la faculté d'établir un état
hypersensibilisé du système DA qui caractériserait
les " drogues dures ". Il est important de soutenir des
études dans ce domaine car cette hypothèse n'est pas
parfaitement établie et son mécanisme moléculaire
demeure inconnu. Il faut donc aider à la mise en place de
modèles animaux et plus encore souris à restriction
d'expression de gène avec déclenchement anatomique
et temporel contrôlé.
IV - L'établissement d'un état d'hypersensibilité
à un produit, à la suite d'usage répété,
pourrait être " stabilisé " par la liaison
du CRF et/ou des glycocorticoïdes à leurs récepteurs
neuronaux.
De très nombreux travaux in vitro et in vivo vont dans ce
sens. Des recherches en neuroendocrinologie devraient être
entreprises pour évaluer les changements hormonaux susceptibles
de permettre une prévision des rechutes aussi bien chez l'animal
que chez l'homme.
V - Les phénomènes biochimiques impliqués
dans la dépendance à court terme devraient être
recherchés de manière prioritaire, en utilisant, en
particulier, les techniques de la biologie moléculaire couplés
à l'utilisation des animaux transgèniques traités
ou non par différentes drogues.
VI - La neurotoxicité de l'ecstasy doit être
étudiée en priorité chez l'homme (métabolisme,
neuroanatomie, neuro-imagerie) afin de déterminer la dangerosité
à long terme de cette substance et des dérivés
apparentés.
VII - Très peu d'études de neuro-imagerie
sont actuellement effectuées en Europe (quelques-unes au
Royaume-Uni et en Suède) et surtout en France pour évaluer
l'effet des drogues, leur rémanence dans le SNC, la relation
entre la dose et l'effet (sensations décrites par le sujet),
la recherche compulsive, les épisodes précédant
la rechute ...
Il s'agit d'un domaine clé dans lequel notre retard se creuse.
Il faut absolument le développer d'autant que ses "
retombées " attendues dans les sciences cognitives et
en clinique sont très nombreuses.
VIII - Il est souhaitable que toutes les précautions
soient prises dans le cas du développement clinique d'un
nouveau médicament actif sur le SNC pour éviter une
possible utilisation toxicomanogène. Ainsi, il serait important
de s'assurer de l'absence d'effets addictifs potentiels :
- des métabolites du principe actif;
- des sous-produits éventuellement aisément accessibles
à des laboratoires chimiques clandestins, en particulier
lorsque le médicament est de structure chimique simple.
IX - Des efforts doivent être faits pour encourager
l'industrie pharmaceutique et la recherche publique à s'investir
dans la lutte contre les toxicomanies.
Les profils ont été étudiés et répertoriés
dans le tableau ci-dessous - tableau nécessairement réducteur;
par exemple, la neurotoxicité à long terme de la MDMA
("Ecstasy "), si elle était établie, placerait
automatiquement cette substance au premier rang des drogues toxiques.
La dépendance psychique est évaluée par la
longueur des effets de rémanence et " l'attirance "
vers le produit ainsi que par l'évaluation approximative
(très forte, forte ...) des rechutes et donc la difficulté
d' " échappement ". Ainsi l'héroïne
et le tabac se retrouvent dans ce groupe avec l'alcool.
La dangerosité sociale tient compte des états comportementaux
qui peuvent engendrer des conduites très agressives et incontrôlées
(cocaïne, alcool, psychostimulants) induites par le produit
ou des désordres variés (rixes, vols, crimes ...)
pour se procurer celui-ci et des risques pour le consommateur ou
autrui, par exemple dans le cas de la conduite de véhicule.
Cela conduit à placer l'héroïne, la cocaïne
et l'alcool dans un groupe de forte dangerosité.
Pour ce qui est de la toxicité générale, il
faut tenir compte du nombre de consommateurs. Le tabac et l'alcool
sont consommés par une très large fraction de la population
et parmi les drogues classées comme " illicites ",
le cannabis est largement le plus utilisé. De ce fait on
peut considérer que l'héroïne, à cause
des risques divers liés à ses pratiques de consommation
(seringue, infections multiples, overdose ...) est le produit conduisant
au risque de décès le plus grand dans les conditions
de consommation de " rue " actuelles. Elle précède
l'alcool et le tabac pour lesquels la dangerosité en termes
de cancer, maladies cardio-vasculaires, hépatiques ... est
très élevée.
Aucune de ces substances n'est complètement dépourvue
de danger. Toutes sont hédoniques, le tabac à un degré
nettement moins important, toutes activent le système dopaminergique,
toutes sont susceptibles d'entraîner des effets plus ou moins
accentués de dépendance psychique. On peut néanmoins
distinguer trois groupes, si on cherche à comparer leur "
dangerosité ".
- Le premier comprend l'héroïne (et les opioïdes),
la cocaïne et l'alcool,
- le deuxième les psychostimulants, les hallucinogènes
et le tabac, les benzodiazépines et, plus en retrait,
- le cannabis.
Ce regroupement peut évidemment être modifié
à la lumière de nouveaux résultats, évoqués
par exemple à propos de la MDMA. Par ailleurs, certaines
benzodiazépines utilisées à des fins de soumission
ou d'autosoumission devraient être placées dans le
premier groupe. Les données actuelles pourraient être
prises en compte pour comparer la législation française
avec celle des pays européens (tableau ci-dessous), qu'il
faudrait du reste modifier en tenant compte de décisions
récentes notamment en matière de cannabis en Belgique.
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Législations européennes sur la consommation, la possession et la
vente de drogues |
(tableau extrait de la thèse de A. Desquelles, Université de Bordeaux-IV)
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Usage
|
Détention de stupéfiants en général
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Possession pour usage personnel
|
Vente à l'usager
|
Italie
|
Non incriminé
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Non réprimé pour de petites quantités Peine
d'emprisonnement (distinction drogues douces/dures)
|
Sanction administrative (suspension du permis
de conduire)
|
Peine d'emprisonnement (distinction drogues
douces/dures)
|
Espagne
|
Non incriminé, sauf consommation dans les
lieux publics (sanctions administratives)
|
Peine d'emprisonnement (distinction drogues
douces/dures)
|
Sanction administrative
|
Peine d'emprisonnement (distinction drogues
douces/dures)
|
Pays-Bas
|
Non incriminé
|
Peine d'emprisonnement (distinction drogues
douces/dures)
|
En théorie peine d'emprisonnement (distinction
drogues douces/dures)
|
Peine d'emprisonnement (distinction drogues
douces/dures)
|
Royaume-Uni
|
Non incriminé sauf opium
|
Peine d'emprisonnement (distinction de 3 niveaux
de dangerosité)
|
Peine d'emprisonnement (distinction de 3 niveaux
de dangerosité)
|
Peine d'emprisonnement (distinction de 3 niveaux
de dangerosité)
|
Irlande
|
Non incriminé sauf opium
|
Peine d'emprisonnement (distinction cannabis/autres
drogues)
|
Peine d'emprisonnement (distinction cannabis/autres
drogues)
|
Peine d'emprisonnement (distinction cannabis/autres
drogues)
|
Allemagne
|
Non incriminé
|
Peine d'emprisonnement
|
Peine d'emprisonnement
|
Peine d'emprisonnement
|
Danemark
|
Non incriminé
|
Peine d'emprisonnement
|
Peine d'emprisonnement
|
Peine d'emprisonnement
|
Belgique
|
Non incriminé sauf l'usage collectif (peine
de prison)
|
Peine d'emprisonnement
|
Peine d'emprisonnement
|
Peine d'emprisonnement
|
France
|
Peine d'emprisonnement
|
Peine d'emprisonnement
|
Peine d'emprisonnement
|
Peine d'emprisonnement
|
Luxembourg
|
Peine d'emprisonnement
|
Peine d'emprisonnement
|
Peine d'emprisonnement
|
Peine d'emprisonnement
|
Portugal
|
Peine d'emprisonnement
|
Peine d'emprisonnement
|
Peine d'emprisonnement
|
Peine d'emprisonnement
|
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Recommandations générales |
1. Évolution des toxicomanies et Surveillance des toxicités
Favoriser la mise en place d'un système d'alerte rapide
sur l'évolution des substances à risque d'abus et
l'introduction de nouvelles drogues, en particulier synthétiques,
de manière à anticiper les mesures à prendre,
en terme de santé publique.
Amplifier les analyses toxicologiques des drogues " frauduleuses
", interceptées par les différents partenaires
participant à la lutte contre le toxicomanie (services de
police, douanes, centres de toxicologie ...) et centraliser les
informations de manière à suivre efficacement l'origine
géographique des produits et les différents types
de falsification.
Répercuter sur les systèmes de prise en charge (hôpitaux,
centres de pharmacovigilance, médecins d'associations, pharmaciens
...) les informations recueillies.
2. Mise en place d'études cliniques des drogues
Les données pharmacodynamiques et pharmacocinétiques
concernant les produits illicites utilisés ou non en toxicomanie
sont partielles, voire manquantes. Les études cliniques ne
sont pas réalisables avec ces produits en France pour des
raisons d'ordre pénal, réglementaire et éthique;
contrairement à d'autres pays comme les États-Unis
ou la Hollande.
Les mesures de connaissance sur les effets en clinique humaine
de ce type de substance incitent à proposer, comme pour les
médicaments, de les évaluer chez l'homme dans un cadre
légal après évaluation des données précliniques
de toxicologie animale.
En fonction des produits, ces études pourraient être
réalisées chez le volontaire sain ou chez le consommateur.
Cela nécessiterait, en outre, une coordination à l'échelon
national, la mise en place de " centres spécialisés "
(type Centre Investigation clinique) agréés et un
soutien " légal ".
La réalisation de telles études et les apports des
données précliniques devraient permettre une meilleure
connaissance sur les effets indésirables de ces substances,
de leurs interactions potentielles avec d'autres produits, médicamenteux
ou non, et sur leur potentiel toxicomanogène.
Il est souhaitable que l'Assistance Publique mette à disposition
des groupes qui s'investissent dans ces études, des postes
techniques comme cela a été fait dans le cas du sida.
3. Enseignement
Il est indispensable et urgent d'initier des programmes d'enseignement
spécialisés sur la toxicomanie (aspects médicaux,
socioculturels et législatifs) auprès des acteurs
de la santé (médecins, pharmaciens, personnel soignant
...). Ces enseignements devraient être mis en place sous le
couvert de l'Éducation nationale dans un nombre limité
(< 10) de villes universitaires.
De même, un module spécifique " toxicomanie "
devrait être " affiché " dans quelques DEA
de pharmacologie, de neuroscience et de santé publique.
Il serait utile de mieux introduire le problème de la toxicomanie
dans les enseignements secondaire et universitaire (médecine,
pharmacie). Le but de ces enseignements devrait être de mieux
appréhender les différentes toxicomanies, leurs risques
et leurs traitements s'il y a lieu.
4. Traitements de substitution
Des moyens financiers devraient être consacrés à
l'ouverture d'un plus grand nombre de centres de substitution. Cette
politique s'accélère actuellement dans de nombreux
pays européens et aux États-Unis (115 000 patients
dépendants des opioïdes sur 600 000 sont en traitement
méthadone). Les résultats démontrent que la
dépendance n'est ni inéluctable ni irréversible.
L'administration contrôlée de méthadone a été
étendue, avec un certain succès aux États-Unis,
au traitement de la toxicomanie à la cocaïne. Les statistiques
du NIDA montrent clairement que le succès des cures "méthadone
" est considérablement amplifié par l'association
de ces cures à des traitements psychothérapeutiques
et/ou psychosociaux (plus de deux fois moins de rechutes). Cela
montre que la substitution constitue un apport efficace pour traiter
les causes profondes ayant entraîné la dépendance.
.
L'ensemble de ces mesures est de nature, comme cela est désormais
bien admis, à diminuer les risques individuels (maladies
sexuellement transmissibles, suicides, troubles mentaux, infections
...), et collectifs (délinquance, prostitution, criminalité).
La mortalité sous méthadone est près de deux
fois inférieure à celle sous héroïne "
frauduleuse ".
Le coût du traitement doit être évalué
à la fois en termes d'amélioration de la santé
pour le patient et au regard du coût pour la société
résultant du comportement compulsif de recherche du produit.
Ces recommandations sont de nature à changer profondément
le point de vue très pessimiste que le public (et de nombreux
acteurs du cadre médical) portent à l'évolution
des toxicomanies. L'exemple du sida a montré que la France
pouvait prendre en charge de manière efficace et humaine
un tel problème de santé publique.
5. Amélioration de l'analyse des données statistiques
concernant les toxicomanies
La très grande complexité des systèmes de
recueil de données et de gestion de celles-ci ne permet pas
actuellement, en France, de " mesurer l'intensité et
le calendrier d'événements tels que l'initiation à
l'usage des stupéfiants, l'entrée en toxicomanie,
la " guérison " ou encore le décès
lié à la consommation de stupéfiants "
(extrait de la thèse d'Aline Desquelles,
" Consommation de stupéfiants en France : Expertise
d'un système d'information et mesure du phénomène
", Bordeaux IV - 29 janvier 1997).
On retrouve des commentaires semblables des responsables d'unités
d'épidémiologie de l'INSERM, en particulier pour ce
qui est des risques mortels et causes du décès. Les
données proviennent actuellement de diverses sources (police,
établissements du système sanitaire et social, centres
de pharmacovigilance ...). Il s'agit, selon A. Desquelles, non pas
de bouleverser le système de recueil de données, mais
d'assurer une couverture précise de la population de consommateurs
abusifs et dépendants. Cela exigerait cependant une procédure
d'enregistrement similaire à ce qui se pratique depuis très
longtemps en Grande-Bretagne (en gardant l'anonymat du patient)
avec renvoi d'un questionnaire par le médecin pour toutes
les consultations de toxicomanes (aux drogues dures addictives).
Il faut toujours, selon A. Desquelles, unifier le système
statistique par définition de dénominateurs communs
à tous les questionnaires (âge de la première
consommation, circonstances, comorbidité ...). Bien entendu,
l'efficacité exige un recueil et une gestion d'abord nationaux
puis européens. Ceci permettrait de tester, à partir
d'observations comparables, l'effet des juridictions et des politiques
de santé européennes encore différentes au
sein de contextes socioculturels et économiques différents,
sur l'évolution de la consommation de stupéfiants.
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Mise en place d'agences européenne et française d'études et de recherches
sur la consommation des drogues (European Research Agency on Drug
Abuse - ERADA) |
La consommation des " drogues " augmente dans tous les
pays industrialisés et il est malheureusement peu vraisemblable
que cela cesse brutalement. Le problème des toxicomanies
aux drogues doit donc être envisagé aux niveaux national
et européen.
L'Europe n'a pas de politique scientifique concertée en
matière de lutte contre les conduites toxicophiles. Il existe
des structures de surveillance et d'évaluation de la prévalence
et de l'incidence des toxicomanies qui fonctionnent de manière
globalement satisfaisante, mais ces structures n'ont pas été
constituées pour envisager des études fondamentales,
cliniques, épidémiologiques, sociologiques ... sur
ces problèmes.
L'émergence d'une plate-forme politique, économique
et monétaire européenne plaide en faveur de la mise
en place d'un organisme central européen sur les toxicomanies.
L'Europe va se situer du point de vue de sa population à
hauteur des États-Unis, pays dans lequel il existe le National
Institute of Drug abuse (NIDA), émanation du National
Institute of Health (NIH) qui a énormément contribué
à une évaluation scientifique des problèmes
posés par les conduites toxicophiles, à leur évolution
et à la mise en place d'une politique de prévention
et de traitement. Cet organisme est, de plus, un interlocuteur écouté
du monde scientifique, politique et des médias du fait d'un
contrôle rigoureux des résultats d'études fondamentales
et cliniques effectuées dans les domaine des " drogues
".
Sa reconnaissance par le public a fait beaucoup évoluer
les mentalités vis-à-vis de la toxicomanie, tant dans
le public que dans le corps médical. L'Europe, et la France
en particulier, a un très grand retard dans ce domaine où
si le sida n'est plus considéré comme une maladie
" honteuse ", mais la toxicomanie le reste.
Enfin, le NIDA a initié avec efficacité de très
nombreuses recherches sur les problèmes posés par
l'usage des drogues, et ces travaux ont eu des répercussions
très favorables dans des domaines clés tels que les
sciences cognitives, la neuro-imagerie ou l'utilisation massive
des animaux génétiquement modifiés pour prendre
quelques exemples. Il en est de même dans le domaine du développement
de nouveaux médicaments du système nerveux central.
La recherche européenne dans le domaine des toxicomanies
est peu soutenue. Les futurs programmes de l'UE, du type BIOMED,
laissent entendre qu'un volet " toxicomanie " sera introduit
dans un programme, mais aucune confirmation n'a encore été
faite et, dans tous les cas, la mise en place des aides ponctuelles
s'effectuera par un comité où les spécialistes
de la toxicomanie sont extrêmement peu nombreux.
La France pourrait jouer un rôle moteur dans la mise en place
d'une structure européenne du fait de la qualité de
ses recherches en neurosciences et d'une participation régulière
et importante dans les découvertes fondamentales autour des
substances toxicophiles, opioïdes en particulier, et du mécanisme
d'action des drogues aux niveaux biochimique et comportemental.
La situation française
Actuellement il existe en France de très nombreux offices,
missions, délégations, intercommissions ... qui se
préoccupent des problèmes liés à la
consommation des drogues. Par ailleurs, considérées
comme des substances toxiques, celles-ci font donc l'objet d'une
surveillance et d'études par les organismes qui s'occupent
de toxicologie auxquels il faut ajouter les centres de pharmacovigilance.
Tout cela crée nécessairement des études redondantes,
une absence de concertation, une dilution des informations et des
difficultés pour mener à bien une véritable
politique de santé publique autour des toxicomanies.
Par ailleurs, il y a une réelle nécessité
et une certaine urgence à améliorer le fonctionnement
des observatoires français et européens des toxicomanies.
La création d'un organisme central européen devrait
conduire à la mise en place d'agences nationales. En France,
l'organisation d'une telle agence pourrait s'effectuer par exemple
sur le modèle de l'Agence nationale de recherche sur le sida
(ANRS) et de la Ligue nationale contre le cancer. Un tel organisme
devrait bénéficier d'une ligne budgétaire propre.
L'agence européenne et les agences nationales comprendraient
un certain nombre de commissions scientifiques.
Leurs missions seraient :
- de mettre en place des programmes d'études et de recherches
sur les mécanismes d'action des " drogues ",
leur traitement et leur prévention;
- de promouvoir des recherches cliniques dans tous les
domaines scientifiques aux toxicomanies (psychiatrie, neuropsychologie,
génétique, neuro-imagerie, pharmacocinétique
et métabolisme, sociologie, anthropologie, économie
de la santé ...);
- de coordonner les programmes de recherches fondamentale et
clinique en rassemblant des spécialistes, neurobiologistes,
médecins, pharmaciens, chimistes et physiciens (PET, Scan,
TRMf), psychologues, épidémiologistes ... nécessaires
à leur réalisation;
- d'évaluer les résultats de ces différents
programmes et d'en informer les organismes de tutelle pour
promouvoir certains secteurs de la recherche en France : Universités,
CNRS, INSERM, AP ...;
- de rassembler les résultats des études cliniques
et ceux provenant des divers organismes publics ou privés
gérant les problèmes de toxicomanie,
- de mettre en place une politique de surveillance efficace
et coordonnée de l'évolution des toxicomanies
et des risques pour la santé publique;
- de faire des propositions pour améliorer des observatoires
européens et nationaux sur les toxicomanies. De ce point
de vue, il est indispensable de faire profiter des expériences
des États membres les spécialistes de pays (en particulier
pays de l'Est) qui risquent d'être rapidement confrontés
aux problèmes des toxicomanies. De plus, ces pays peuvent
devenir des producteurs placés à proximité
des pays membres;
- d'inciter à la mise en place de programmes industriels
dans le domaine du traitement des toxicomanies.
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Source : B. Roques (Rapport au secrétariat
d'État à la Santé) |
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