Le recyclage des narcodollars ne peut se faire sans une participation,
volontaire ou involontaire, de nombreux organismes financiers. Les
banques ont été longtemps peu regardantes sur l'origine
des fonds déposés. Depuis la Renaissance, la banque
est au coeur de la civilisation matérielle et de l'économie
capitaliste, elle finance tous types de marchés: conquête
coloniale, traite des noirs, guerre, drogue, sans s'embarrasser
de scrupules ni de règlements et contrôles gouvernementaux,
les moins performants étant sanctionnés. Depuis des
lustres, elle blanchit l'argent de la fraude fiscale, des transferts
illicites de capitaux, des trafics d'armes, de denrées, de
tabac, d'alcool, de marchandises, de pots de vin et commissions
occultes, fausses factures, fortunes pillées par les dictateurs
et tyrans du monde entier. La banque et la finance étaient
prêts à accueillir l'argent de la drogue.
Le secteur bancaire a longtemps été le secteur le
moins surveillé du commerce international : pas de licence
pour l'export de capitaux, pas d'informations à fournir...
Le rôle particulier des banques suisses a été
démontré dans un certain nombre d'affaires récentes,
allant jusqu'à provoquer la chute du ministre de la justice
Elisabeth Kopp (affaire de la connexion libanaise).
De même, les USA ont laissé prospérer certains
paradis des affaires comme le Delaware (état du Nord Est
des USA), où il n'est pas possible d'obtenir de renseignements
sur les sociétés installées. En Floride se
sont développés des organismes très efficaces
pour le recyclage de l'argent sale. Mais le recyclage de l'argent
de la drogue implique surtout de multiples paradis bancaires. En
Europe : Suisse, Luxembourg, Liechtenstein, île de Man, Jersey
et Guernesey, Monaco, Andorre, Gibraltar, le Vatican. En Amérique
dans les Caraïbes, Bermudes, Bahamas, Caïman, Jamaïque,
Panama... En Asie pacifique : Hong-Kong, Macao, Taiwan, Singapour.
De plus en plus, certains pays du tiers monde cherchent à
profiter de ce commerce très lucratif : Nigeria, Panama...Les
banques des anciens pays de l'Est se lancent aussi avec des atouts
qui auraient été indéniables (convertibilité).
Dans les pays industrialisés, l'augmentation des contrôles
sur les activités bancaires entraîne un déplacement
vers les intermédiaires non bancaires.
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C'est un défi très important. Les 3X3 :
- 3 partenaires : trafiquants, milieux d'affaires et parfois gouvernementaux.
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- 3 produits : héroïne, cannabis, cocaïne
- 3 grandes organisations criminelles : cartel colombien de Medellin
et Cali pour la cocaïne, triades chinoises de Hong-Kong pour
l'héroïne du triangle d'or, mafia sicilienne pour l'héroïne
du croissant d'Or.
Sous l'impulsion de quelques pays, un programme mondial d'action
a été mis en place, dans le cadre de l'ONU :
- prévention et réduction de la toxicomanie en vue
de l'élimination de la demande
- traitement et réadaptation des drogués
- contrôle de l'offre de stupéfiants
- suppression du trafic illicite de stupéfiants
- lutte contre les effets néfastes de l'argent provenant
de la drogue
- renforcement de la répression.
Un effort particulier est entrepris contre les produits précurseurs
: éther, acétone, kérosène, permanganate
de K pour la fabrication de base de cocaïne, ou anhydride acétique
pour l'héroïne. Douane et police sont fortement impliquées.
Le GAFI (groupe d'action financière sur le blanchiment)
a adressé des recommandations aux 7 membres (les 7 plus grandes
puissances les plus industrialisées). La levée du
secret bancaire est notamment autorisée en cas de soupçon.
Sous la pression internationale, la Suisse a adopté un projet
de loi réprimant le blanchiment, interdit les prête-noms
bancaires, contraint les banques à demander l'identité
des clients pour les opérations de caisse supérieures
à 25 000 F suisses.
En France : levée du secret bancaire, renforcer les règles
d'identification des clients, accroître la vigilance des institutions
financières, améliorer la coopération internationale.
Économie mondiale de la drogue
: Marabout/le Monde Jean Claude Grimal (Le Monde Éditions 93)
GAFI : groupe d'action financière
TRACFIN : Traitement du Renseignement et de l'Action contre
les circuits financiers clandestins. Organisme spécialisé
français dépendant du ministère de l'économie
et des finances. |