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L'argent de la drogue |
Les sommes liées au trafic de drogue sont considérables
et les bénéfices se présentent toujours en
espèces. Le problème des trafiquants est de rendre
cet argent plus propre, de le transformer en monnaie scripturale
(dépôt sur un compte en banque), de lui donner une
apparence respectable, avant de l'utiliser de façon profitable
et sans risque.
On estime que 80% environ du revenu brut des trafiquants peut être
considéré comme profit disponible. Le GAFI, groupe
d'action financière international, distingue 3 méthodes
principales de blanchiment par le système financier, chaque
forme s'effectuant en plusieurs étapes, simultanées
ou successives:
- Le placement (conversion des espèces)
- L'empilage (dissimulation des sources)
- L'intégration (absorption des circuits légaux)
Ces différentes méthodes impliquent la participation
d'institutions financières, parfois complaisantes, le plus
souvent négligentes.
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La conversion des espèces |
Les billets sont plus souvent pesés que comptés.
Le terme de blanchiment tire son origine des blanchisseries utilisées
par Al Capone pour donner une façade légale à
ses multiples activités. Transfert des espèces en
monnaie fiduciaire plus propre / achat de chèques de voyage
ou de bons au porteur.
Tous les commerces et services qui réalisent l'essentiel
de leur chiffre d'affaire en liquide (restaurants, discothèques,
stations-service, salons de jeu, casinos) sont aussi des intermédiaires
pratiques pour le lavage de l'argent sale. Les casinos font l'objet
d'une surveillance spéciale dans de nombreux pays (utilisation
de jetons et de plaques, possibilité d'utiliser les plaques
dans un autre casino ou d'échanger les plaques contre un
chèque de casino. Certains individus douteux peuvent figurer
au sein du consortium, le casino pouvant ainsi jouer un rôle
actif.
Pour déjouer la surveillance de la police, les trafiquants
utilisent les services de joueurs professionnels bien connus, de
même qu'ils se servent de certains prête-noms complaisants
(et parfois célèbres) pour gérer les casinos
qu'ils possèdent. Une autre méthode consiste à
utiliser les services de passeurs pour transporter le cash vers
des intermédiaires financiers complaisants. Pendant longtemps,
des avocats d'affaires ou des courtiers financiers suisses ou luxembourgeois
ont réceptionné des valises de billets qui ont alimenté
des dépôts anonymes sur des comptes numérotés.
L'Autriche a été le dernier pays d'Europe occidentale
où les dépôts anonymes en banque étaient
autorisés. Mais les trafiquants utilisent surtout les paradis
bancaires, qui présentent de multiples avantages, absence
de dispositions légales faisant obligation aux banques de
conserver des traces de l'identification de leurs clients ou des
opérations réalisées, absence de contrôle
des autorités bancaires. Certaines places offshore disposent
même d'héliports ou de postes de débarquement
hors contrôle douanier, ce qui facilite la tâche des
passeurs.
Interpol a constitué en 1983 un groupe spécialement
chargé de dépister et d'analyser les fonds provenant
d'activités criminelles : le FOPAC, dont un sous groupe s'intéresse
exclusivement aux narcodollars.
Le " Bank Secrecy Act ", loi promulguée en 1970,
oblige à déclarer toute opération financière
supérieure à 10 000 dollars.
Une autre méthode consiste à acquérir en
espèces des objets précieux : bijoux, métaux
précieux, oeuvres d'art, objets de collection, produits de
luxe, etc.
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Dissimulation des sources et recyclage |
Une fois la monnaie fiduciaire douteuse transformée en monnaie
scripturale, les trafiquants utilisent la technique de l'empilage
pour cacher l'origine douteuse des fonds. Il s'agit de multiplier
les opérations financières pour les rendre plus complexes
et opaques : transferts télégraphiques de fonds à
l'étranger, d'abord vers des institutions financières
peu regardantes ou des sociétés BAL installées
dans des paradis bancaires, puis vers des compagnie bancaires plus
respectables. Après plusieurs passages de frontière
et plusieurs intermédiaires bancaires, il est possible de
ramener les capitaux vers les pays d'origine sous une forme respectable.
Exemple : La filiale française de la BCCI: Banque de crédit
et de commerce international.(Luxembourg, 3 succursales Paris, Nice,
Monaco.
La DNRED : direction nationale du renseignement et des enquêtes
douanières et les douanes américaines pénètrent
le réseau de la BCCI soupçonnée de travailler
pour le compte du cartel colombien de Medellin. Les dirigeants à
Londres et Paris sont personnellement en relation avec un membre
du cartel colombien pour lequel ils réalisent des opérations
bancaires : l'argent est ainsi blanchi et rapporte. Les dépôts
sur compte courant sont regroupés sur un compte à
terme commun. Interviennent des opérations d'investissement
au nom de sociétés financières ayant leur siège
dans des pays considérés comme des paradis fiscaux
(Caïman, Bahamas, Panama), créées pour le seul
intérêt du cartel.
L'exemple de la BCCI illustre aussi la technique de " l'intégration
". Celle-ci consiste à réintroduire les sommes
blanchies dans l'économie en les mélangeant avec des
fonds d'origine licite : double facturation ou surfacturation, prêts
apparents à des sociétés respectables, encaissements
de bons anonymes souscrits par des prête-noms. Après
blanchiment, l'argent est recyclé dans des affaires licites.
Les trafiquants utilisent beaucoup la technique du prêt " dos
à dos ", qui consiste à obtenir des prêts
garantis par des dépôts d'argent sale dans d'autres
agences du même groupe, les banquiers étant moins regardant
pour les remboursements en espèces des prêts.
Ce recyclage s'effectue traditionnellement dans les pays d'origine
des trafiquants, dans les pays industrialisés, mais aussi
depuis peu dans les anciens pays de l'Est et l'Allemagne réunifiée.
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