Voici un petit peu plus d'an, alors que je m'arrachais les cheveux
avec une situation familiale complexe, du fait notamment de la consommation
de haschich de l'un de mes enfants, une de mes amies m'a encouragé
à m'adresser au CSST *.
En effet, si beaucoup d'hommes n'ont pas besoin de s'épancher en
cas de difficultés, il n'en est pas de même pour les femmes, sinon
la tension ne cesse de monter dans la famille et la situation s'aggrave.
Au CSST *, j'ai rencontré une équipe de deux bénévoles qui ont
montré une attitude de grande écoute " active ". Elles m'ont fait
passer en revue l'ensemble des éléments de la situation, chaque
membre de la famille, les interactions des uns et des autres.
Ensemble, nous avons réfléchi aux éléments que nous pouvions modifier
dans cette situation, de façon à détendre l'atmosphère autour de
notre fils. Des personnes proches de la famille sont entrées en
scène… Pendant six mois, nous nous sommes rencontrées presque tous
les quinze jours.
Après avoir fait des " petits boulots " une situation stable a
été proposée à notre fils dont les études supérieures s'étaient
limitées à deux semaines de faculté.
Grâce à certains membres de la famille et à l'entourage proche,
notre fils est depuis 9 mois maintenant employé commercial dans
une entreprise qui s'est engagée à le former.
S'il n'est pas encore totalement dégagé de ses mauvaises habitudes,
il est au travail chaque matin, à l'heure, après une heure de transport
dans chaque sens ; donne satisfaction à ses supérieurs, et se sent
accepté par le personnel.
Ma conclusion est que ce type de situation est beaucoup plus courant
qu'on n'accepte de le dire. L'usage de drogue est une honte pour
la famille. On essaie souvent de se le cacher et de le cacher aux
autres. Une des raisons est que, bien sûr, nos chers trésors ne
viennent pas s'en vanter. Que l'usage de ces produits les rend agressifs
et désintéressés de tout ce qui se passe autour d'eux.
On prie pour que cela se tasse tout seul… Mais souvent, il faut
boire la coupe toute entière.
Or, dès les premières craintes, il faudrait pouvoir en parler.
Il faudrait surtout ne pas permettre au stress de s'installer dans
la famille. L'adolescence finira un jour par passer !
Que ce témoignage soit un message d'espoir
pour les parents confrontés au problème de la drogue avec leur enfant.
Mon fils aîné, garçon hypersensible et très mature dès l'âge de
7 ans m'a toujours soucié. Il a très mal supporté la séparation
de ses parents à l'âge de 9 ans. Il s'est petit à petit renfermé
; lui qui était brillant au début de sa scolarité est devenu un
élève médiocre puis franchement chahuteur. Je recevais ses amis
à la maison (petits copains à problème et plutôt " en décalage "
comme lui. Nous communiquions mais assez superficiellement.
D'écoles publiques en écoles privées, il parvint en seconde et
en mars de cette année scolaire voulut cesser d'aller au lycée.
Après plusieurs entretiens avec son professeur principal et moi-même,
il fut convenu de lui accorder 1 mois pour trouver du travail. Il
n'avait aucune formation, aucun savoir-faire. Il trouva un emploi
de manutentionnaire. Orgueilleux et très tenace, il garda ce travail
2 ans ; puis aidé par son père, il créa une petite entreprise
de livraisons. Il gagnait correctement sa vie. C'est alors que je
l'ai convaincu de prendre un appartement car il sortait beaucoup
et n'admettait aucune discussion à ce sujet. Il avait 20 ans.
Il loua 2 pièces dans Paris. Il se retrouvait seul après sa journée
de travail. C'est ainsi qu'il rencontra un soir, dans un café, un
jeune de son âge : un toxicomane sans toit, rejeté par sa famille.
Il l'a accueilli chez lui. Je recevais ce garçon lors des fêtes
familiales (bien sûr mon fils ne m'avait pas dit qui il était vraiment),
il a initié mon fils aux drogues dures…
J'étais soucieuse, je ne voyais plus mon fils seul. Au téléphone,
nous échangions des banalités, il fuyait.
Il a fini par se séparer du copain et par quitter l'appartement
et alla vivre 6 mois chez son père avec qui il avait des rapports
difficiles (j'appris plus tard qu'à cette période là, il réussit
seul à se sevrer de toute prise de produit pendant 6 mois), puis
celui-ci lui demanda de partir et il replongea dans la toxicomanie.
En février 94, il allait avoir 25 ans. En rentrant de vacances,
je l'ai trouvé chez moi dans un état pitoyable. Jusqu'à ce jour,
il avait voulu me cacher tout mais il était arrivé à un tel point
de souffrance qu'il avait besoin d'aide. Il se piquait 3 fois par
jour (héroïne, cocaïne), il voulait arrêter cette descente aux enfers,
il avait essayé de se sevrer seul mais le manque était terrible.
J'appelai aussitôt le médecin de famille qui lui donna un traitement
pour calmer le manque . Au bout de 2 jours, tentative de suicide
(un tube complet d'anxiolytique en une prise) .
Depuis le 17 février, je recherchais des personnes susceptibles
de m'aider. J'étais seule. Son père ne voulait plus entendre parler
de lui. Il était revenu vivre chez moi.
D'associations en associations et sur les conseils d'une amie,
je téléphonai au CSST *. Deux intervenants me reçurent le même jour
à 20h30.
Plus de pudeur, je devais sauver mon fils, il était en danger de
mort (il vivait avec une jeune femme toxicomane).
Après une heure d'entretien, je reçus des conseils fermes, concrets
et aussi un grand réconfort moral. J'avais confiance, j'allais agir
dans le bon sens.
Le soir même à 23 heures, mon fils passait à la maison, drogué,
il venait chercher un peu d'argent qu'il lui restait et repartait
en voiture. Atterrée, craignant qu'il ne cause un accident, j'appelai
la police aussitôt après son départ. Il passa une nuit au commissariat
puis fut libéré le lendemain mais mis sous injonction thérapeutique
(obligation de se présenter au CSST * pour des entretiens chaque
semaine).
Il dormait dans un foyer d'hébergement proposé par le CSST * et
le vivait très mal (promiscuité, saleté, solitude le déprimaient).
Au bout de 2 mois de galère et d'entretiens au CSST *, il accepta
de se soigner : 5 jours de cure à l'hôpital puis le 4 mai
94, départ dans un centre de cure de longue durée établi
dans différents pays étrangers et en France. La prise en charge
était assurée par d'anciens toxicomanes (travail, discussions, vie
en autarcie).
Mon fils écrivait peu. J'avais des nouvelles en appelant le centre
principal, je savais qu'il tenait bon. Au bout de 10 mois ½, en
février 95, il choisit de s'enfuir une nuit et revint de Suisse
sans papiers, sans bagages.
Rapidement, il trouva un travail de manutentionnaire à Rungis,
la nuit. Il voulait nous montrer qu'il était prêt pour une nouvelle
vie. Il habita quelque temps chez son père puis loua une petite
chambre.
En novembre 95, un matin, nous avions rendez-vous avec **** au
CSST *.
Mon fils avait des dettes, il était terriblement angoissé. Il fut
décidé de faire un dossier de surendettement.
En repartant, nous nous sentions légers tous les deux, et, sur le
trottoir de l'Avenue, il me dit, " j'aimerai reprendre des études
".
Le jour même, nous trouvions un GRETA (formation pour adultes) dans
un lycée hôtelier de Paris. Le lendemain, il se présentait. L'année
scolaire avait commencé mais il restait une place. Son patron accepta
sa démission. Une nouvelle vie commençait pour lui. Il recevait
un petit salaire, il vivait à la maison.
En mars 96, il trouva un appartement tout proche de celui d'un
de ses frères. Il était heureux d'être libre et de s'assumer. L'année
scolaire terminée - CAP et BEP en poche, il trouva du travail. Courageux
et efficace, il est apprécié.
En 2000, pendant les vacances, il rencontra une jeune fille étrangère
avec laquelle il parlait beaucoup. Elle a eu une enfance difficile
mais dans une famille unie et aimante.
Ils se sont revus au cours d'autres séjours dans ce pays.
En septembre 2001, elle est venue vivre chez lui. Elle est vraiment
celle qu'il lui fallait : calme, rassurante, à l'écoute, très psychologue.
En novembre 2001, ils se sont mariés en France.
A partit de mon premier entretien au CSST *, grâce à *****, j'ai
toujours eu confiance, je n'ai jamais cessé d'espérer. Je savais
que mon fils avait en lui la force de caractère nécessaire à une
Renaissance.
Ne restez pas seuls, gardez confiance, Si le
jeune se sait aimé, il évoluera positivement.
Je tiens par mon témoignage, à apporter
un espoir aux familles en difficultés.
Voilà mon histoire :
La scolarité de *****. a bien débuté, malheureusement, suite à
des déménagements successifs, Il s'est désintéressé de l'école.
A 14 ans déjà, enfant perturbé, il fréquente des copains plus ou
moins sérieux. Ma reprise de travail à cette même époque m'a empêché
de voir ce qui se passait. Différentes choses m'intriguaient, sans
trop en comprendre le sens : trop de cigarettes, petits vols à la
maison, bijoux cachés dans des chaussettes, barrettes de haschich
; tous ces événements ont fait que je me suis posé
mille questions. Je suis devenue très inquiète et angoissée.
Les études vont mal, beaucoup d'absentéisme, menaces de renvoi
; j'étais de plus en plus mal, les choses se dégradent très rapidement.
*****. a 16 ans environ : au cours d'une dispute, il m'a dit une
phrase terrible ; " tu ne te rends pas compte, je suis malade ".
Encore une fois, interrogation de ma part et POURQUOI ? Je n'osais
en parler à personne.
Il ne rentre pas de la nuit, il prend la voiture (sans permis),
nous n'avons plus d'autorité sur lui.
Un membre de ma famille m'a conseillé d'aller voir un organisme
s'occupant de toxicomanes. J'ai assisté à plusieurs réunions ainsi
que mon mari et c'est alors que j'ai vraiment compris la gravité
de la situation, choc terrible, complètement démunie, que faire
? Nous lui donnons un ultimatum : le travail ou les soins ? *****.
choisit de partir au PATRIARCHE.
Un an de soins. Au départ, le sud-ouest, ensuite l'Espagne et …
fugue… se croyant guéri !
Un de mes frères le prend en charge dans le sud-ouest, il travaille
en boulangerie, mais pose des problèmes à ma famille car il voulait
sortir la nuit.
Ensuite, départ à l'armée, malgré ses réticences ; il y arrive complètement
drogué, il est pris en charge une semaine à l'hôpital de l'armée
où il apprend qu'il est séropositif.
C'est l'horreur pour toute la famille. Je me sens très seule et
désespérée. Je prends des médicaments pour dormir.
Par une amie, j'obtiens les coordonnées du CSST *. La démarche
n'est pas facile. Tout raconter sur mon fils et la famille, c'est
dur ! …, mais sans ces personnes, leur appui et leur soutien, je
me serais écroulée. Le fait de parler avec des gens connaissant
le sujet m'ouvre les yeux, m'aide à changer ma façon de vivre, de
faire vis à vis de lui.
Les repas de famille étaient une angoisse pour moi, *****. s'enfermait
dans la salle de bain sous prétexte de prendre une douche mais en
ressortait très bizarre… jusqu'au jour où j'ai découvert une cuillère
et une seringue… j'étais anéantie.
La vie devenait insupportable pour mon mari et moi et d'un commun
accord, nous avons décidé de ne plus accepter cette vie qui nous
détruisait ainsi que nos deux autres filles.
Suite à un nouveau drame avec notre fils, n'en pouvant plus, nous
lui avons acheté une voiture à bon marché et lui avons dit qu'il
devait partir, où il voulait, mais qu'il ne pouvait plus rester
à la maison.
Nous savions qu'il avait un point de chute en province, mais quelle
direction, allait-il prendre ? Il a eu le bon réflexe d'aller chez
des amis qui l'avaient déjà aidé. Il s'est accroché, a trouvé du
travail et a accepté de rencontrer des médecins pour traiter sa
maladie.
Depuis il a rencontré une personne sérieuse avec qui il fait sa
vie.
Après de nombreux petits boulots, il vient de monter une petite
entreprise dans le bâtiment ; son travail lui plaît, il est content
et fier de lui et nous aussi par la même occasion.
Les liens avec la famille, plutôt distendus, ont complètement changé,
à tel point qu'une de nos filles, qui a beaucoup souffert de voir
son frère si mal, lui a demandé d'être le témoin à son mariage,
inutile de vous dire le bonheur de notre fils.
Je voudrais faire passer ce message à toutes les familles en grande
difficulté et leur faire comprendre qu'il ne faut jamais baisser
les bras, avoir confiance et...
NE JAMAIS RESTER SEULS. |