Bonjour, mon prénom est ***** et je suis une alcoolique
toxicomane !
J'ai 33 ans, mère de deux enfants. Deux gars. Un de 13 ans
et l'autre de 8 ans.
J'ai commencé à consommer à l'âge de
14 ans. À cette époque, l'alcool était un plaisir
pour moi et m'en procurait. Au fil des années je consommais
plus régulièrement.
Jusqu'en 1998, je consommais modérément selon moi,
mais selon mon entourage, ils me disaient souvent que j'avais un
problème d'alcool.
Mais un alcoolique qui ne veut pas voir qu'il l'est, réussit
très bien à se mentir. Ce que je faisais.
Début 1999, je vis une séparation, et là
ma consommation devient plus que régulière, elle devient
presque hebdomadaire, mais à ce stade je peux rester deux
ou trois jours sans consommer. Ma déchéance s'installe
sans trop que je m'en aperçoive. Ma famille aurait bien voulu
faire quoi que ce soit pour m'aider, mais moi, je ne voulais pas
de cette aide, je n'avais pas de problème.
Je commence alors à conduire ma voiture après avoir
consommé, alcool et médication. (gravols, somnifères
en quantité industrielle). C'est le fun, j'ai l'impression
de mieux conduire dans cet état. Je bois en présence
de mes enfants, je bois à leurs parties de hockey. Je bois
partout. Et mon lieu préféré, était,
bien évidemment, chez moi. Là, au moins personne ne
pouvait me tanner. La sainte paix, pensais-je.
Août 2003, je me trouve un emploi après avoir suivi
un cours de secrétariat. Je travaille dans un bureau d'optométriste.
Heureuse d'avoir un emploi dans ma branche, en arrivant le soir
chez moi, je prends 2, 3, 4, 5 consommations. Je mérite bien
ça, je travaille!
Quelques semaines passent, je manque un samedi, car je suis sortie
la veille. Quelques mois passent, je manque encore une journée.
Je suis bien contente de voir que mes patrons croient que je suis
vraiment malade. Ils ne peuvent pas s'imaginer que je leur mente,
je suis une très bonne employée au bureau.
Dernière semaine de juin 2005. Je suis en vacances. Et là,
je découvre les amphétamines. WOW, pas cher, ça
buzz longtemps. Tu ne manges pas, tu ne dors pas, tu te sens invincible.
Que désirer de plus ?
Alors là, l'enfer commence. Je dis enfer, sur le moment je
me crois au dessus de tout. Je me fais des p'tits cocktails. Alcool,
médication et amphétamine.
Juillet 2005, je suis en congé maladie suite à une
hospitalisation. On découvre que j'ai un problème
au coeur, il bat à 155 pulsations par minute. Alors, mon
médecin me prescrit de l'Aténol, médicament
pour ralentir le rythme cardiaque. Et là, en étant
en congé maladie, je pouvais consommer encore plus. Et en
plus j'avais un nouveau médicament, super! Je prends donc,
boissons, amphétamines et pas mal d'aténol pour être
certaine que mon coeur ne saute pas. Je n'avais aucune envie me
ramasser à l'hôpital et qu'ils découvrent que
j'ai un problème de consommation.
Août 2005, je consomme de plus en plus. La boisson devient
mon obsession, je me lève pour boire. Je ne vis que pour
boire. Même jusqu'à aller voler de l'argent à
mes deux enfants que j'aime le plus au monde. Je bois et mélange
la médication 24 heures sur 24. Je me lève le matin
et je demande à mes enfants si ils ont soupé la veille.
Ils me répondent, oui, mais je n'en ai aucun souvenir. Les
jours se suivent et se ressemblent. Je me lève déjà
en boisson le matin, car j'ai pris soins d'apporter de la boisson
dans ma chambre au cas ou j'aurais soif.
Le 29 janvier 2006, mon plus jeune a un tournoi de hockey à
St-Jean-de-Dieu. Cette journée là, mon plus jeune
était avec son père, alors j'ai demandé à
l'aîné si il voulait venir avec moi, il n'a pas voulu.
Je pars donc pour St-Jean-de-Dieu vers 10 h. Déjà
à cette heure, j'avais pris 2 ou 3 consommations. J'arrive
donc à l'aréna, je regarde la partie finale de mon
fils. Vers12 h, la partie est terminée, je demande à
mon plus jeune s'il veut rester avec moi pour la journée,
il ne veut pas, car il va faire de la moto-neige avec son père.
Je reste donc un peu à l'aréna. Je prends une bonne
bière. Deux, trois, quatre, cinq.
Aux environs de 18 :00, j'appelle mon père pour l'informer
que je quitte l'aréna et que je vais aller chercher mon aîné
dès que j'arriverai à Rivière-du-Loup. Mon
père me demande si j'ai consommé, je lui dis que non
car j'étais consciente que c'était l'hiver et que
c'est moins évident de conduire dans ces conditions de route.
Il me dit. « Ok, sois prudente ». Je prends donc le
volant.
Mon trajet de St-Jean-de-Dieu à l'autoroute 20, je ne m'en
rappelle pas. J'emprunte donc l'autoroute 20, je dépasse
un véhicule lourd, à une vitesse à laquelle
je n'avais jamais roulé auparavant. J'en suis la première
surprise. Suite à ce dépassement, quelques secondes
après, je perds le contrôle de ma voiture. Je fais
des tonneaux et là, la voiture s'immobilise. Je me demande
si je suis encore en vie. Car au moment où je faisais mes
tonneaux, j'ai revu le film de ma vie.
Ouf ! La première question qui me vient à l'esprit
est « Va-t-il y avoir quelqu'un qui va venir m'aider? »
Et là, j'entends. « Y a-t-il quelqu'un à l'intérieur
? » J'étais soulagée, car la tête à
l'envers, ce n'est pas trop une position confortable. J'ai de la
chance, la personne en question est pompier volontaire. Il me demande
si je peux bouger. Je dis, oui. Alors il me détache et m'installe
plus adéquatement en attendant l'arrivée des secouristes.
Me sortir de la voiture a été un casse-tête
pour les secouristes, mais ils réussissent. Ils me transportent
à l'hôpital en ambulance. Les procédures normales
ont été faites. Questions, prélèvement
sanguin. Je me retrouve avec des cicatrices à la main gauche
et une entorse cervicale. Ah, oui, j'oubliais, on m'informe que
mon foie et mon pancréas sont fortement endommagés.
Je quitte l'hôpital vers 21h30 en compagnie de mon père.
Je passe la nuit chez mes parents.
Le lendemain je retourne chez moi, un peu ébranlée,
mais pas assez pour me rendre compte que j'ai frôlé
la mort la veille. J'appelle donc, un de mes amis pour lui demander
de passer au dépanneur pour aller me chercher quelque chose
à boire. Je peux boire sans problème maintenant, je
n'ai plus de voiture, alors je ne suis plus dangereuse pour personne.
Cette semaine là, je ne m'en rappelle pas, j'étais
devenue un zombie.
Dans la nuit du 3 au 4 février, j'entends quelqu'un entrer
chez moi, je me lève et je me tiens pour ne pas tomber, car
j'ai absorbé, alcool et médicaments, étourdie
pas mal la fille. Et qui je vois au bas de l'escalier ? Mes parents.
Il est 2 h dans la nuit, ils me disent qu'ils viennent me chercher
et m'emmènent chez eux car ils ont peur que je meurs. Je
ne fais aucune résistance, et je pars avec eux.
Le lendemain, avec une intervenante en toxicomanie, on fait une
demande d'admission au centre de désintoxication d'Edmundston.
On nous répond qu'il y a une liste d'attente et ils y vont
avec les priorités. De mon coté, je ne vais pas vraiment
bien. Car chez mes parents, il n'est pas question que je puisse
consommer. Je prends de la médication mais c'est pas pareil.
Je rappelle au Centre le lundi soir. Je suis en détresse
et ça ne va pas du tout. L'infirmière perçoit
ma détresse au bout du téléphone. Et par la
grâce de je ne sais pas trop qui, elle m'annonce que j'ai
une place pour le mardi matin. Mon père vient donc pour m'emmener
le lendemain matin. Je dis au revoir à mes enfants. Très
difficile.
J'entre au Centre et là, commence ma désintoxication.
J'étais censée être partie pour 10 jours maximum,
car les désintoxications sont de cette durée. Ils
m'ont gardé 18 jours. Ma première semaine a été
infernale. J'ai fais des cauchemars, je passais des sueurs chaudes
aux sueurs froides sans parler des tremblements. J'ai eu un sevrage
de médicaments. Ils disent qu'une désintoxication
aux médicaments est comparable à une à l'héroïne.
Je n'ai pas les mots qui peuvent expliquer ce que j'ai vécu
lors de cette première semaine, cependant, j'espère
m'en rappeler le restant de ma vie.
Je suis sortie du Centre le 24 février 2006. Je suis allé
chez mes parents une semaine. Car quand on sort de désintoxe,
on est fragile et terriblement fébrile. Je suis rentré
chez moi, la semaine suivante. Tout au long de mon séjour
au Centre, je m'étais informé si je pouvais aller
en Centre de réadaptation suite à ma désintoxe,
et le personnel me l'a fortement recommandé. J'ai été
admise au centre de réadaptation de Ste Anne des Monts le
31 mars et j'en suis ressortie le 28 avril dernier. Cette thérapie
m'a beaucoup aidé. Ils nous donnent les outils pour faire
face à notre retour à la vraie vie.
Aujourd'hui après 11 mois d'abstinence, ma vie a repris
un sens. Je vais aux meetings des Alcooliques Anonymes tous les
mercredi soir. Mes enfants sont fiers de moi et n'ont plus peur
qu'il m'arrive quelque chose en boisson. Ce combat est le plus gros
combat de ma vie et je vais le gagner.
Mes enfants ont été victimes de mon alcoolisme et
de ma toxicomanie. Aujourd'hui ils me disent ce qu'ils vivaient
au fond d'eux tout au long de ma déchéance. Quand
on dit que l'alcoolisme affecte la vie des gens qui nous entourent,
je peux vous affirmer, que c'est celle de nos trésors qu'elle
affecte en tête de liste. Jamais j'aurais cru et voulu une
telle chose de ma part...Et pourtant.
Il y a même pas un an, j'étais au plus creux de ma
descente. Mais aujourd'hui après près de 11 mois d'abstinence,
je réalise que ça se fait. J'ai rushé et je
rush encore contre ce combat, mais il en vaut la peine.
Avec mon témoignage, je veux montrer aux gens où
l'alcool, la drogue ou la médication peut nous mener. Mais
que si on le veut vraiment, il est possible de mettre fin à
cet enfer. Je veux être quelqu'un pour quelqu'un dans mon
cheminement d'abstinence. Et si je réussis à faire
réfléchir une seule personne, alors j'aurai réussi
ma mission.
Merci |