Vous avez maintenant une quasi-certitude que votre
enfant, parent ou proche consomme de la drogue. Que faire ?
Ne
paniquez pas et ne vous précipitez pas :
La panique et la précipitation sont mauvaises conseillères.
Si vous agissez dans la précipitation, vous avez toutes les
chances d'agir à contresens de ce qui est nécessaire
pour l'aider à s'en sortir. Ne l'emmenez pas, par exemple,
séance tenante chez un psychiatre simplement parcequ'il a
fumé du cannabis ou pris de l'ecstasy ou même de la
cocaïne.
Lorsque vous découvrez que votre enfant ou votre proche
se drogue, il est probable qu'il le fait depuis un certain temps
sans que vous n'ayez rien détecté. Pendant toute cette
période, vous et lui avez vécu dans un équilibre
peut-être précaire mais en surmontant vos difficultés.
Il est donc inutile de paniquer, vous pouvez continuer ainsi pendant
encore quelque temps, il y a rarement, à ce stade, une
urgence absolue, d'autant que s'il est devenu dépendant,
le temps nécessaire pour s'en sortir se comptera en mois
ou en années.
Il y a urgence seulement si vous découvrez votre
enfant dans le coma après une overdose ou dans un état
physique particulièrement inquiétant, auquel cas il
faut immédiatement appeler des secours médicaux.
Par contre, ne passez pas à côté du problème,
ne négligez pas toute consommation de drogue et particulièrement
si elle commence avant 15 ans.
Prenez le temps de réfléchir à ce
que vous allez faire et à la façon dont vous allez
gérer cette situation. Prenez conseil auprès de
spécialistes, consultez un centre d'aide et de soin spécialisé
pour vous faire aider à définir votre action.
Ne
préjugez pas d'une consommation :
Tout comme un verre de vin ne fait pas l'alcoolique, une cigarette
ne fait pas le tabagique, un adolescent qui fume occasionnellement
du cannabis n'est pas un toxicomane !
Cette consommation ne l'entraînera pas forcément dans
l'escalade vers des produits de plus en plus dangereux.
Par ailleurs, les consommations abusives et les dépendances
font partie le plus souvent d'un ensemble de problèmes :
anorexie, boulimie, idées et conduites suicidaires, troubles
du comportement. Elles sont l'expression de souffrances, de difficultés
passagères ou plus profondes qu'il s'agit d'identifier
et de prendre en compte au cas par cas.
Instaurez
le dialogue et un minimum de confiance :
Tout d'abord ne "l'engueulez" pas et ne le menacez
pas. Beaucoup de personnes consomment de la drogue pour
s'anesthésier face à un stress ou des difficultés
qu'elles ne supportent pas. Vos remontrances, cris ou vociférations
auront pour seul effet de le stresser davantage et donc de renforcer
son envie irrépressible de consommer, effet inverse de ce
que vous souhaitez naturellement.
Parlez en ouvertement avec lui le plus tôt possible,
rien n'est pire que de faire l'autruche, particulièrement
lorsque l'on n'a pas de certitude, une telle attitude sera toujours
interprétée comme un accord tacite ou un désintérêt
face à ses problèmes.
A l'opposé, ne le "fliquez" pas. L'espionnage
n'a jamais contribué au dialogue. Il s'en apercevra rapidement
et vous aurez définitivement supprimé toute chance
de pouvoir agir efficacement. On ne traite pas une consommation
de drogue ou une toxicomanie en jouant au chat et à la souris.
Agissez ouvertement et au grand jour, même s'il ment
et se cache.
Si le dialogue a été coupé depuis longtemps,
renouer des liens peut prendre un temps important, des jours ou
des semaines, mais il faut impérativement passer d'abord
par cette phase pour réinstaurer la confiance et pouvoir
ensuite aider le jeune.
Trouvez ou créez un moment propice où vous êtes
seul à seul pour parler.
N'abordez pas ce sujet s'il est sous l'emprise de la drogue,
ou si vous êtes vous-même sous l'effet de la colère,
la discussion serait stérile, attendez d'être tous
deux aptes à discuter calmement.
Montrez votre empathie et votre préoccupation,
moins face à sa consommation que face aux problèmes
qui le conduisent à consommer.
Adoptez un comportement ouvert, sans agressivité,
et essayez de faire un état de la situation :
- Quel(s) est (sont) le(s) produit(s) consommé(s) ?
- La consommation est-elle rare, fréquente ou régulière
?
- Quelle est la quantité consommée ?
- Dans quelles circonstances consomme-t-il, seul ou en groupe
?
- Y a-t-il des conséquences nocives ou des dommages ?
- Par quelles raisons justifie-t-il sa consommation et
quelle importance reconnaît-il à cet usage
(Pour s'amuser de temps en temps, pour faire comme les autres,
parce qu'il l'estime indispensable à son bien-être)
?
Il faut prêter attention au fait que l'usager de drogues
a une tendance naturelle à nier sa consommation et/ou à
critiquer son entourage ou la société pour se déculpabiliser.
Ceci n'interdit pas d'analyser objectivement ses propres erreurs
et insuffisances vis à vis de lui.
S'interroger, parler en toute confiance d'une consommation,
quelle qu'elle soit, est nécessaire. La plupart des consommations
resteront sans conséquences graves si le dialogue est instauré.
Il est fondamental de préserver la communication, même
si vous ne comprenez pas, dans un premier temps, son attitude et
ses motivations.
N'introduisez pas, sur ce sujet, de complicité
entre vous et lui qui pourrait se retourner contre vous.
Vous êtes le conseiller et l'exemple. Ayez une autorité
rassurante.
Si, plus jeune, vous avez fait vous même des expériences
avec la drogue, ne le dites surtout pas ! Il pourrait
penser qu'après tout, si vous l'avez fait, ce n'est pas si
grave.
Les phrases qui commencent par "de mon temps..." ont aussi
toutes les chances de rompre le dialogue.
Ne l'envoyez pas faire des tests de dépistage
pour vous rassurer ou lui prouver que vous avez raison. Cette
attitude policière a toutes les chances de rompre définitivement
le dialogue et de vous ôter toute possibilité de l'aider.
Les tests ne vous diront pas pourquoi votre enfant consomme de
la drogue, lui seul pourra vous le dire.
Si de plus les tests sont négatifs, ce qui est fréquent
car, à part le cas d'un usage régulier de cannabis,
les traces de drogue disparaissent rapidement, vous serez décrédibilisé.
Ayez
un discours crédible :
Informez vous par tout moyen utile sur les drogues et la toxicomanie
pour en parler avec un maximum d'objectivité. Vous
pouvez, par exemple, lire les différentes rubriques de ce
site ou acheter des livres qui abordent ce sujet. Il est important
de montrer que vous savez de quoi vous parlez.
Dans tous les cas : Ne dramatisez pas mais ne banalisez pas
!
Cherchez
la ou les causes de sa consommation :
La drogue est parfois le révélateur d'un problème
sous-jacent qu'il est utile de découvrir. Ce peut être
un problème familial, scolaire, professionnel ou parfois
un problème psychique ou neurologique non révélé.
La prise de drogue est alors la béquille qui aide à
supporter le problème.
Déterminer la cause est fondamental si l'on veut agir
efficacement. Il sera inefficace de soigner les effets si la cause
n'est pas soignée. Supprimer la béquille ne traitera
pas le mal.
Ce n'est que lorsque la cause sera prise en compte que vous pourrez,
ensuite seulement, l'amener à comprendre que la drogue
n'a jamais aidé personne à résoudre les difficultés
de la vie, bien au contraire, ni à paraître plus intelligent
ou plus brillant.
Remarquons tout de même que dans la majorité des
cas la cause première d'usage de drogue est ludique ou conviviale,
c'est ensuite la dépendance qui pousse à la consommation.
Si la cause est liée à un problème qui vous
est propre, clarifier votre situation et résoudre votre problème
ou l’expliquer pour le rendre acceptable est une priorité.
Parmi les causes liées aux parents, on trouve fréquemment
:
- la mésentente ou la séparation des parents,
- un père "absent" de l'éducation de
son enfant (absence physique ou professionnelle ou désintérêt)
ou qui a tendance à le dévaloriser en cas d'échec
scolaire ou autre, et une mère qui compense en le surprotégeant,
- un enfant qui n'a aucun espace d'initiative, dont les parents
exercent une éducation autoritaire sans s'intéresser
à l'opinion de leur enfant,
- ou au contraire un enfant laissé totalement à
lui-même sans guide ni conseil et qui pense que ses parents
se désintéressent de lui,
- ou même un enfant dont les parents sont trop indulgents
et qui montrent une affectivité excessive qui lui est
trop pesante.
Ne
vous isolez pas :
Pour supporter une situation douloureuse et difficile à
vivre, il est nécessaire de se faire aider. L'accepter
c'est souvent trouver des solutions à des situations jugées
insupportables. Chercher conseil et assistance n'est pas une marque
de faiblesse ou une trahison mais dans ce cas un acte de sagesse.
Parlez en sans honte ni gêne aux personnes qui vous
entourent, le secret est souvent un secret de polichinelle
qui ne vous protège en rien. Parlez en aux autres personnes
de confiance particulièrement à votre médecin.
N'hésitez pas à contacter tout organisme spécialisé,
qui saura vous aider et vous orienter.
Pensez bien que vous êtes loin d'être le seul dont
l’enfant ou le proche consomme de la drogue !
Participez éventuellement à un groupe de parole pour
les parents qui vous aidera à comprendre votre situation
et à être moins angoissé.
Vous ne pourrez pas avoir le bon comportement et aider efficacement
votre enfant ou proche si vous êtes angoissé.
Il ne faut donc pas hésiter à demander conseil
et aide pour pouvoir dominer l’angoisse et maîtriser
la situation.
Ne
vous culpabilisez pas et ne le culpabilisez pas :
Ne vous culpabilisez pas et ne culpabilisez pas les autres membres
de votre famille ou entourage. Les jeunes sont soumis à
un nombre impressionnant de sollicitations extérieures sur
lesquelles vous n'avez pas de maîtrise directe.
La culpabilisation n'apporte rien de positif et ne peut que vous
affaiblir.
Pensez à l'avenir et à ce que vous allez faire
plutôt qu'au passé et à ce que vous avez fait
ou pas fait.
Par ailleurs, la cohésion familiale est le meilleur gage
de réussite.
Ne culpabilisez pas le jeune dont la consommation peut
être causée par une souffrance profonde que vous n'avez
pas détectée.
Au contraire, essayez toujours de le valoriser même
à outrance et de mettre en avant la moindre de ses réussites.
Les usagers de drogue sont souvent des jeunes qui doutent énormément
d’eux-mêmes et qui ont un très fort besoin d’être
encouragés.
Il faut lui redonner confiance en lui-même pour qu’il
se sente ensuite assez fort pour arrêter.
N'exercez pas sur lui de chantage qui pourrait le culpabiliser,
comme un chantage du genre "si tu n'arrêtes pas, je fais
la grève de la faim", sous-entendu "je me laisse
mourir et je t'en rends responsable", ou toute autre action
culpabilisante.
Plus vous mettrez la pression et le culpabiliserez, plus il cherchera
à y échapper et à oublier en consommant encore
plus. La drogue change son échelle de valeurs et votre action
n'aura jamais l'effet que vous escomptez, elle aura la plupart du
temps l'effet inverse.
Par ailleurs, en agissant ainsi, vous utilisez ses propres méthodes
(les toxicomanes font souvent du chantage à leurs proches),
vous vous mettez au même niveau que lui et perdez votre statut
de référence qui lui est absolument indispensable.
Ayez
un comportement clair, ferme et cohérent :
Ce n'est pas toujours facile !! c'est même souvent difficile
et pourtant.... absolument nécessaire. Il ne faut pas laisser
le jeune se désocialiser ou faire fi des règles de
vie en société.
Fixez des interdits et des limites en les explicitant.
Expliquez chaque fois pourquoi vous en décidez ainsi mais
ne vous laissez pas entrainer dans des discussions sans fin, vous
avez le droit d'avoir votre point de vue et de ne pas le discuter.
Tant que cela est possible, n'acceptez pas de drogue ni les
objets associés à votre domicile. Obligez le à
s'en débarrasser ou faites le vous même. Ce sera au
moins un lieu où il ne consommera pas.
Examinez avec attention toute demande d'argent ou de sortie, posez
des jalons mais ne refusez pas systématiquement tout,
négociez éventuellement.
Contrôlez lorsque c'est possible mais surtout sans
tomber dans l'inquisition, ne faîtes pas de l'espionnage.
Restez ferme et maintenez dans toute la mesure du possible
une forte cohésion des parents et de l'entourage
face à ces jalons.
Surveillez
votre argent et vos biens
La consommation de drogues peut induire une recherche désespérée
d'argent qui conduit le jeune à voler ses proches pour assouvir
son besoin. Sa conscience et son raisonnement vis-à-vis de
l’argent sont totalement altérés par le besoin
de drogue.
S'il est mineur, ne le laissez pas libre d'utiliser un compte
où le découvert serait possible et surveillez son
compte s'il en a un.
S'il est majeur, refusez d'éponger ses dettes aussi
élevées soient-elles et laissez le assumer cette
situation. Si vous épongez ses dettes, vous pouvez être
sûr qu'il en fera de nouvelles !
Rencontrez éventuellement son banquier pour qu'il ne lui
propose pas des prêts qu'il ne saurait rembourser.
Ne cédez pas à un chantage affectif, très
courant pour obtenir de l'argent, l'argent et l'affection
sont deux choses distinctes.
Ne cédez pas à des menaces ou des violences
de sa part ou de la part de ses dealers, si la situation devient
trop difficile, n'hésitez pas à appeler des voisins
ou la police, particulièrement si vous ou lui êtes
menacés par des dealers.
Ne
l'abandonnez pas et incitez le à se faire aider :
Il a plus que jamais besoin de vous ! Ne le mettez
pas à la porte, cela frôle la non-assistance à
personne en danger ! (Nous savons que c'est parfois plus facile
à dire qu'à faire). Assurez lui le gîte, le
couvert, les soins qui lui sont nécessaires et surtout entourez
le de toute l'affection qui lui est indispensable. N'hésitez
pas à lui dire clairement que vous l'aimez.
Tant que vous le pouvez, ne le laissez pas vivre seul à l'extérieur
car il aura toutes les chances de tomber dans la précarité
et la désocialisation.
Incitez le, calmement, à se soigner
et à se faire aider en rencontrant un médecin
ou en prenant rendez-vous dans un centre d'aide et de soin (voir
les pages suivantes dans cette rubrique => Sortir
de la toxicomanie, => La prise
en charge et => Trouver
de l'aide ).
Insistez et aidez le à prendre rendez-vous et à
se rendre aux rendez-vous car sa volonté est souvent inhibée
par la drogue. Accompagnez le si nécessaire.
Ne négligez pas les risques de santé,
le SIDA ou l'hépatite C n'arrivent pas qu'aux autres. Incitez
le à se faire dépister dans un centre spécialisé
ou en voyant son médecin. Assurez vous, s'il se pique, qu'il
se procure des seringues stériles en pharmacie, et qu'il
utilise des préservatifs dans ses rapports sexuels. Prendre
une telle assurance n'est pas un accord tacite sur son comportement
mais une attitude de parent responsable.
Si vous jugez que, par son comportement, il met sa vie ou celle
des autres en danger, vous pouvez demander, sans son consentement
même s'il est majeur, une "hospitalisation sur demande
d'un tiers" ou "H.D.T.". Vous devez pour celà
consulter votre médecin traitant qui se chargera de la procédure.
Mais attention, la H.D.T. permet d'éviter un drame ponctuel
mais elle ne résoud jamais le problème de la toxicomanie
(voir sur la page "Sortir de la toxicomanie" le paragraphe
=> L'hospitalisation sous contrainte
).
Ne
perdez pas espoir :
La très grande majorité des cas ne concerne qu'une
consommation occasionnelle qui n'aura pas de conséquence
grave et s'arrêtera à la maturité (psychique
et sociale) si vous y avez prêté attention.
La plupart des toxicomanies avérées trouvent une solution
à plus ou moins long terme si le toxicomane et sa famille
se font aider.
La proportion de cas sans solution est marginale. |