Distinguons au préalable l'usage simple et maîtrisé
de drogue, qu’il soit nocif ou non, lié plutôt
à un usage festif occasionnel ou récurrent (un verre
de whisky avec des amis par exemple), mais qui peut aller jusqu'à
l'abus, et la toxicomanie qui est un usage compulsif
non ou mal maîtrisé et généralement induit
par des problèmes sous-jacents dont l'utilisateur n'a pas
nécessairement conscience.
Le désir d'arrêter sa consommation n'apparaît
que lorsqu'on en ressent des effets négatifs sur sa santé
ou sa vie sociale, c'est à dire lorsqu'on a atteint au moins
le stade de l'abus
Cesser un usage abusif mais sans dépendance réelle,
encore que la frontière entre ces deux états n’est
pas toujours bien claire, demande surtout de la volonté et
de la persévérance.
Le seul problème est que de nombreux utilisateurs de drogue
croient maîtriser leur consommation alors qu'il n'en est rien.
Le fait qu'ils n'ont ni la volonté ni la persévérance
suffisante, alors qu'ils ont pris conscience de leur problème,
témoigne d'une consommation non maîtrisée et
donc d’une dépendance.
Sortir de la toxicomanie est plus difficile car c'est bien plus
que l'arrêt de l'usage de drogue. C'est aussi cesser et
faire le deuil du plaisir ou du soulagement apporté par la
drogue ainsi que d'habitudes, de réflexes, de gestes et d'un
mode de vie liés à sa consommation et souvent fortement
ancrés dans la personnalité.
Cela va prendre du temps. Si le sevrage physique est généralement
rapide, de dix jours à deux mois selon la drogue et les doses
absorbées, le temps nécessaire au sevrage psychique
et à l'abandon des habitudes se comptera en années,
avec des rechutes qui sont normales et ne doivent pas être
considérées comme un échec mais comme un élément
du processus de "guérison". Ce sera d'autant plus
long que le consommateur a commencé jeune et a consommé
longtemps. Sortir de la toxicomanie est une opération
de longue haleine qui doit s'envisager dans la durée.
Lorsque la consommation de drogue est due à un problème
sous-jacent psychique, familial ou social, il est aussi nécessaire
de comprendre pourquoi le consommateur a commencé à
prendre de la drogue et pourquoi il en consomme aujourd'hui, ceci
pour soigner les causes de cette consommation et non pas seulement
les effets.
Essayer d'arrêter la consommation sans cette analyse préalable
et se contenter de soigner les effets sans soigner les causes est
dans ce cas souvent voué à une rémission qui
ne sera que temporaire ou même à l'échec.
Néanmoins, soigner médicalement les effets permet
au toxicomane de trouver la force nécessaire pour affronter
ses autres problèmes et avancer vers la guérison.
Se faire
aider
Il est très exceptionnel, voire impossible, d’arrêter
seul dès que l'on a atteint un début de dépendance,
consciente ou non. En effet, la drogue modifie profondément
la personnalité et annihile la volonté et la persévérance
nécessaires.
Il faut impérativement se faire aider et suivre par un(des)
spécialiste(s).
Le spécialiste vous aidera à trouver et analyser les
causes de la consommation, il pourra prescrire la démarche
adaptée et effectuer le suivi nécessaire. S'il est
médecin, il pourra prescrire des médicaments qui atténueront
les difficultés du sevrage.
Il vous aidera aussi et surtout à ne pas baisser les bras,
pour utiliser un terme à la mode il sera votre "coach".
Sortir de la toxicomanie s'apparente à un entraînement
sportif de haut niveau, cela demande des efforts importants, du
temps, de la volonté et énormément de persévérance,
toutes choses qui ne sont pas naturelles chez l'être humain
et particulièrement chez le toxicomane. Comme pour les athlètes,
il lui faut donc un "entraîneur" apte à maintenir
son moral et à le motiver pour faire les efforts nécessaires,
c'est un des rôles importants du spécialiste.
Il ne faut pas non plus penser que l'on pourra aider seul quelqu'un
à s'en sortir si l'on n'a pas soi-même les connaissances
de base et la compétence nécessaires.
Fréquemment des jeunes filles ou jeunes femmes qui tombent
amoureuses d'un utilisateur de drogue pensent d'abord pouvoir l'aider
à s'en sortir sans aide extérieure, par le seul fait
de leur amour .... puis elles nous consultent ensuite désemparées.
Elles sous-estiment très largement la difficulté à
vivre aux cotés d’un toxicomane, avec ses mensonges,
ses non-dits et son manque de volonté. Le toxicomane a une
vie propre avec sa drogue, vie qu’il ne partage pas.
Beaucoup de parents sous-estiment également les difficultés
que cela représente et tardent à chercher de l'aide.
C'est autant de temps de perdu.
Les parents ou proches, souvent désemparés et
désorientés, ont autant besoin d'aide que l'utilisateur
lui même et ne doivent pas hésiter à consulter
un spécialiste pour se faire conseiller sur la démarche
adaptée au cas de leur enfant, conjoint(e) ou ami(e), ainsi
que sur les attitudes appropriées.
La démarche
à suivre
La démarche commence fréquemment par la rencontre
avec un médecin (le médecin de famille de préférence
ou un autre) ou un personnel soignant qui oriente ensuite l'utilisateur,
et ses parents si nécessaire, vers les structures appropriées.
Il ne faut pas hésiter à parler de ce problème
avec son médecin, il en a vu beaucoup d'autres et il respecte
le secret médical . Votre médecin comme tous les
thérapeutes est tenu au secret médical et ne vous
dénoncera pas.
Vous pouvez aussi commencer par des conseils par téléphone
ou par une consultation auprès d'un organisme spécialisé
(tenu également au secret médical).
En France, les structures spécialisées sont nombreuses
et présentes dans tous les départements. La
plupart reçoivent aussi les parents et les proches pour les
conseiller. L'accueil y est généralement confidentiel
et gratuit, il peut être anonyme sur demande expresse de l’intéressé.
- Pour connaître les différentes structures en France
=> La prise en charge des toxicomanes.
- Pour trouver celles qui sont proches de chez vous => Trouver
de l'aide.
Il est particulièrement important de se sentir en confiance
avec la structure et le thérapeute choisi. Si tel n'est
pas le cas, n'hésitez pas à en changer et même
à en essayer plusieurs. Les parents peuvent parfaitement
se faire aider par un centre différent de celui qui suit
leur enfant, chacun devant "se sentir bien" là
où il est aidé.
L'objectif sera d'abord l’évaluation de la consommation
puis sa diminution jusqu’à l'abstinence, c'est
à dire l'arrêt de consommation de drogue, assisté
ou non médicalement selon le besoin et les possibilités,
puis enfin l'arrêt du comportement toxicomaniaque c'est-à-dire
la disparition de la pulsion de consommation et, si nécessaire,
la réinsertion sociale.
Dans certains cas graves, on pourra se contenter d'amener le toxicomane
à un confort de vie et une réinsertion sans pour autant
arrêter complètement la consommation ou avec la prescription
d'une substitution à long terme.
Les soins devront donc porter sur l'ensemble des problèmes
liés à la toxicomanie :
- Gestion du manque.
- Analyse et soin des causes de la consommation de drogue, lorsque
c’est possible.
- Soin des conséquences somatiques (physiques) générées
par la drogue.
- Soin des conséquences psychiques.
- Traitement de la dépendance physique et psychique : cure
de sevrage (dépendance physique) et post-cure (dépendance
psychique).
- Aide à la résolution de problèmes familiaux.
- Traitement des problèmes sociaux.
Ces soins doivent être conduits dans un certain ordre
et seul un spécialiste peut vous aider à les planifier
convenablement. Il est inutile, par exemple, d'entreprendre
un sevrage sans avoir réfléchi à la post-cure
et au suivi qui viendront le conforter.
Par ailleurs, seul un spécialiste peut traiter convenablement
les cas particuliers : par exemple le cas des femmes enceintes qui
consomment des drogues induisant une dépendance physique
et dont le foetus, intoxiqué par la consommation de la mère,
est devenu lui aussi dépendant.
Il est impératif pour une femme qui consomme de la drogue
de mentionner ce problème à son médecin ou
son gynécologue dès qu'elle a connaissance de sa grossesse,
ou mieux dès qu'elle souhaite avoir un enfant. Il en
va de la santé, parfois de la vie et de l'avenir de son bébé.
Dans la majorité des cas, le traitement a lieu en "ambulatoire",
c'est à dire que l'usager mène sa vie habituelle et
se rend dans les différents lieus de soin et d'aide : médecin,
hôpital, Centres de Soins d'Accompagnement et de Prévention
en Addictologie (CSAPA), etc., comme on se rend chez son médecin.
Dans les cas difficiles, le traitement pourra avoir lieu en
"résidentiel" dans un hôpital ou un centre
spécialisé avec hébergement pour assurer un
suivi constant. Les places sont malheureusement rares en France
et il est nécessaire d'être introduit par un médecin
ou un CSAPA qui jugeront de l'opportunité du suivi résidentiel.
Pour les drogues qui s'y prêtent (opiacés, tabac)
et seulement pour elles, on pourra utiliser un traitement
de substitution : Subutex® ou Méthadone pour les
opiacés, patch nicotinique pour le tabac.
Le résultat
L'expérience montre que la grande majorité des
toxicomanes qui se font aider s'en sortent et retrouvent une vie
normale, avec un délai plus ou moins long selon la drogue
utilisée et l'état de leur toxicomanie. |