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Introduction |
Ce chapitre aborde le rôle des parents dans la prévention de
la consommation de drogue et de la toxicomanie. Il met l'accent
sur les attitudes qui favorisent cette prévention.
De façon générale, le rôle des parents est de conduire l'enfant
à l'autonomie de sa vie d'adulte, de l'aider à "prendre
son envol" en lui inculquant les connaissances et comportements
qui lui seront indispensables pour affronter les difficultés de
la vie, s'insérer harmonieusement dans la société et enfin vivre
heureux. Cela s'appelle "l'éducation".
Actuellement, nous constatons qu'à 17 ans, plus de 50% des enfants
ont expérimenté une drogue prohibée, 72% le tabac et 92% l'alcool.
La première consommation intervient généralement durant l'adolescence,
dans cette période difficile de remise en question des acquis et
d'essais à l'autonomie. Elle peut aussi, selon le caractère de l'enfant
et les circonstances, intervenir plus tôt, dans la pré-adolescence,
voire dès l'âge de 8 ou 10 ans. Par ailleurs, l'effet est d'autant
plus grave et la dépendance apparait d'autant plus rapidement
que l'enfant commence jeune.
Nous constatons également qu'aucun milieu social n'est
épargné, la drogue est cependant un peu plus consommée
dans les milieux aisés (là où est l'argent)
que dans les milieux défavorisés.
Aucun parent ne peut raisonnablement prétendre que son enfant
est à l'abri des drogues.
Nos enfants côtoient la drogue quotidiennement.
Il est donc important pour les parents d'adopter très tôt un
comportement préventif qui évitera ou limitera les excès propres
à l'adolescence et leurs dangers.
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De l'enfance à l'adolescence |
Dans cette période de sa vie, l'enfant est déjà dans une phase
d'expérimentation intense, basée en bonne partie sur l'imitation
de son entourage.
Il faut donc lui apprendre, outre les connaissances de base, les
valeurs qui vous paraissent fondamentales, les interdits et permissions
de la vie en société et le respect de ces valeurs et interdits.
Il faut aussi l'aider à acquérir la confiance en lui-même, qui l'aidera
à se construire et à atteindre plus tard l'autonomie.
Les attitudes
favorables seront donc :
- L'amour et l'affection qui le sécurisent et qu'il faut
lui manifester en permanence et de façon claire, tant pour
la mère que pour le père.
- Le respect de l'enfant pour qu'il apprenne le respect
des autres et de lui-même.
- L'attention des parents pour combler ses besoins, non
seulement physiques, mais aussi psychologiques, émotionels
et spirituels et lui apprendre, très tôt, à
avoir des valeurs personnelles.
- La présence et l'attention des deux parents (simultanées
ou non) pour son équilibre.
Nous constatons trop fréquemment, dans les cas de toxicomanie,
l'absence du père dans l'éducation de l'enfant : père effectivement
absent ou trop absorbé par sa vie professionnelle et qui laisse
à la mère toute la responsabilité éducative. Le père
doit prendre le temps de s'investir personnellement dans l'éducation
de ses enfants.
- L'écoute et la communication : il faut habituer l'enfant
à communiquer librement avec vous pour pouvoir, plus tard, discuter
de sujets "tabous" tels que la drogue ou le sexe.
Pour cela il faut savoir l'écouter et l'encourager à s'exprimer,
cette attitude le valorise, le fait exister et lui donne de l'assurance.
Il faut ensuite le guider et l'aider à forger son jugement.
Combien d'adolescents n'osent pas parler de drogue ou de sexe
avec leurs parents !
- L'exemple que l'enfant imitera et qui servira de référence
à son jugement.
L'enfant voue à ses parents, qui lui sont nécessaires pour vivre,
une confiance absolue, il est donc important d'être un exemple
le moins faillible possible.
Il est particulièrement nécessaire de respecter soi-même les valeurs
que l'on inculque, il sera, entre autre, difficile d'interdire
à son enfant de fumer un joint si l'on est soi-même fumeur ou
si l'on boit de l'alcool quotidiennement.
N'oubliez pas que souvent votre enfant n'écoute pas
ce que vous dites, mais qu'il regarde toujours ce que vous faites.
- La confiance et l'encouragement pour aider l'enfant à
acquérir la confiance en lui-même, à construire sa personnalité
et lui apprendre à refuser les sollicitations non souhaitées.
Enfin, ne sous-estimez pas l'importance des principes que vous
inculquez à votre enfant. Il les mettra certainement à mal pendant
l'adolescence, mais ils constituent un acquis dont il fera son profit
une fois devenu adulte.
N’acceptez de sa part, et ce dès le plus jeune
age, aucun manque de respect envers vous-même. L’habitude
du respect envers vous est essentielle pour qu’il vous écoute
et vous obéisse à l’adolescence, lorsqu’il
aura des envies d’indépendance, qu’il vous dominera
par sa taille et que vous n’aurez plus la force de vous opposer
physiquement à lui.
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Adolescence et expériences |
Quel parent d'adolescent n'a pas trouvé cette période
invivable ? On parle de "crise de l'adolescence". C'est l'âge
de la remise en cause de tous les principes apportés par les parents,
les professeurs ou les éducateurs, l'âge de l'opposition presque
systématique.
C'est aussi l'âge des expériences : Première cigarette,
première ivresse, premier amour, première relation sexuelle, premier
joint..... Ces essais passent souvent par des excès et par des doutes.
L'adolescent, dans son chemin vers la maturité, veut élaborer sa
propre opinion et forger sa personnalité, non plus à l'aune de l'expérience
de ses parents, mais au travers de ses propres expériences qui sont
alors souvent transgressives.
Il conforte son attitude (souvent contestée par ses parents), auprès
des copains de son âge. C'est la période des clans, des codes et
des idées, opposés à ceux des adultes. L'expression peut en être
"bruyante" et provocatrice ou "silencieuse" et accompagnée d'un
repli sur soi.
Ces manifestations ne signifient pas a priori que l'adolescent
est en difficulté.
Il faut remarquer que la grande majorité des adolescents
passent cette période sans problèmes vraiment importants,
ni pour eux, ni pour leurs parents.
Pendant cette période d'hésitations, entre recherche d'autonomie
ou maintien de la dépendance vis-à-vis des parents, compliquée à
vivre pour l'adolescent comme pour son entourage, il faut pour les
parents, maintenir et défendre les valeurs qui leur semblent
importantes, tout en dosant leurs interventions et l'affirmation
de leur autorité.
Il faut exercer l'art, plutôt difficile, de trouver le juste milieu
entre autorité et permissivité, entre liberté et contrôle.
S'il est indispensable de marquer les limites et de mettre
en garde un adolescent contre les dangers qu'il peut courir, il
est tout aussi nécessaire de le valoriser, de l'encourager,
et de favoriser ses contacts avec l'extérieur.
Aider un adolescent à trouver ses forces personnelles est
aussi essentiel pour lui que de connaître les limites posées
par les adultes, particulièrement s'il manifeste une attitude
de repli et s'il éprouve un besoin important de confiance
et d'estime de lui-même.
L'objectif est bien, à terme, de pouvoir se séparer de
son enfant devenu adulte, pour qu'il vole de ses propres
ailes, en lui conservant amour et affection et en l'ayant armé et
guidé vers son autonomie.
Nous constatons aussi que les enfants plongent fréquemment
dans la toxicomanie dans trois cas typiques de comportement des
parents :
- Le style "autoritaire" qui se caractérise
par de la discipline mais peu d’intérêt pour
les opinions des enfants, l'enfant se drogue pour échapper à une
autorité trop forte.
- Le style "négligent" où
les parents se déchargent de leurs responsabilités
et manifestent une permissivité excessive. L'enfant ne
se sent pas guidé et même parfois se croit abandonné.
- le style "indulgent" qui se manifeste
par de la compréhensions sans exigence, accompagnée
parfois par une affectivité fusionnelle trop pesante de l'un ou
des deux parents.
Il vous faudra adopter le style "vigilant" fait
à la fois d'écoute et de règles de conduite
claires. C’est d'expérience l'attitude la
plus efficace.
Les attitudes
favorables vont être les mêmes que celles de l'enfance avec certaines
modulations :
- L'amour et l'affection toujours et toujours et de
manière inconditionnelle et visible. Il est remarquable
que la plupart des toxicomanes pensent, à tort ou à
raison, que leurs parents ne les ont pas vraiment aimés.
Il ne faut pas hésiter à leur dire « je
t'aime » sans fausse pudeur, particulièrement
de la part du père. Il faut que l'adolescent soit sûr
et certain d'être aimé.
- La présence du père, comme guide, autorité (bienveillante)
et référence, est encore plus importante, particulièrement pour
les garçons. Mais le père n'est pas là que pour
faire acte d'autorité, il doit communiquer et s'intéresser
à eux et à leurs activités, voire en partager
certaines.
- L'écoute et la communication qu'il faut absolument entretenir
pour que votre adolescent ne s'isole pas de vous.
Si la communication s'est dégradée, il est fondamental que
vous fassiez tout pour la rétablir.
Ecoutez le, intéressez vous à lui, donnez votre avis sans porter
de jugements abrupts, appelez un chat, un chat, les adolescent
sont directs, et n'hésitez pas à parler de sexe, de violence ou
de drogue.
N'hésitez pas à parler avec lui de la drogue.... même si vous
pensez en savoir moins que lui sur ce sujet. Il faut que ce genre
de discussion entre lui et vous soit naturel.
Aussi, informez vous sur les drogues et sur la toxicomanie auprès
de sources sérieuses pour pouvoir en parler avec lui sans
idées fausses ou préconçues.
Parlez en sans minimiser le problème mais aussi sans exagérer
ou dramatiser. Restez le plus objectif possible.
- Le maintien des valeurs : même si votre adolescent discute
ou critique vos valeurs fondamentales, conservez-les fermement.
Vous avez été longtemps sa référence, ce n'est pas le moment de
changer ! La permanence de votre comportement le rassure dans
une période où il doute de tout.
- La pose de limites et d'interdits claires et explicites
: Dire non à un adolescent sans avoir peur d'exercer son
autorité, sont des attitudes éducatives importantes.
Refuser ou fuir les conflits ne résout pas les problèmes.
Par contre cédez sur les points moins importants tels l'habillement
ou la coiffure.
Exprimez vos positions clairement, sans ambiguïté
mais sans agressivité, en les expliquant et acceptez que votre
enfant puisse avoir une opinion personnelle différente, ce sera
toujours mieux que de vouloir lui imposer une opinion à laquelle
il n'adhère pas.
Souvent le problème n'est pas dans sa rébellion,
courante à cet âge, mais dans votre réaction
à cette rébellion.
- La confiance et l'encouragement pour l'aider à
s'épanouir, dans cette période de doutes, il en a encore
plus besoin.
- Laissez lui des initiatives et laissez le se prendre
progressivement en charge, même s'il commet des
erreurs. Laissez le assumer les conséquences de ses
erreurs.
Les enfants surprotégés, à qui
les parents ne laissent pas d'initiative ou réparent
eux même systématiquement les erreurs s'adonnent
fréquemment à la drogue.
- Donnez lui le droit à l'échec, ne le
culpabilisez pas s'il a fait des expériences malheureuses,
à cet âge c'est normal. Ces expériences n’ont
pas un caractère définitif, rien ne sert de
dramatiser un essai ou une erreur.
Apprenez lui à parler de ses erreurs, c'est important.
Montrez-lui qu'il s'agit d'expériences et que de toute expérience
on peut tirer profit. A cette occasion, redites lui que vous
l'aimez.
- Ne le dévalorisez surtout pas, particulièrement
s'il n'obtient pas les résultats scolaires que vous
espérez. Même s'il ne le montre pas, il est le
premier à en souffrir et à douter de lui. Écoutez
le plutôt pour essayer de comprendre pourquoi il ne
réussit pas et l'aider à progresser ou à
s'orienter convenablement.
Il n'est pas nécessaire de faire Polytechnique pour
être heureux dans la vie !
La dévalorisation est également une cause
fréquente de toxicomanie.
- Soyez positifs et apprenez-lui à l'être.
Valorisez le chaque fois que c’est possible en
mettant toujours en avant ses réussites plutôt
que ses échecs, cela lui donnera confiance en lui.
D'autres
points sont à considérer :
- Le détachement : Laissez votre enfant se détacher progressivement
de vous et se tourner vers l'extérieur, il entame sa marche vers
son autonomie d'adulte, votre rôle est de l'aider à
partir. Laissez le faire à son propre rythme et encouragez le
à voir ses amis.
Ne le retenez pas dans l'enfance par un chantage affectif pour
le garder près de vous ou sous votre coupe, c'est
le plus sûr moyen de le voir se droguer.
Cependant votre enfant n'est pas encore un adulte, il faut donc
le conseiller et le guider en lui laissant de plus en plus de
libre-arbitre.
- La bande de copains : votre enfant va attacher une importance
particulière à ses amis et camarades, à son "clan". Acceptez les
!
Ne les critiquez pas trop systématiquement s'ils ne vous plaisent
pas... comme votre enfant, ils ont aussi des qualités !
Mieux, incitez le à les recevoir chez vous, au moins vous les
connaîtrez. Et dans ce cas, montrez-vous à la fois présent mais
discret.
Incitez également votre enfant à exprimer ses
propres jugements par rapport à ceux des autres et
à savoir se démarquer par rapport à son groupe,
à exprimer et assumer des choix différents pour
ne pas se laisser entraîner sur une mauvaise pente.
- La drogue et les relations sexuelles : Soyez clairs dès
le départ sur ce que vous acceptez ou refusez particulièrement
à la maison. Vous aurez plus de mal à maîtriser ce que votre enfant
fait à l'extérieur.
N'acceptez en aucun cas de la drogue à la maison, ni de
sa part, ni de la part de ses copains. Vous seriez le complice
d'un délit !
Expliquez-lui que la drogue n'a jamais résolu aucun
problème et peut, par contre, l'entraîner vers
des problèmes difficilement solubles.
- La cohérence des parents : Votre adolescent mettra toujours
à profit vos incohérences, et particulièrement les divergences
de point de vue entre son père et sa mère. Soyez très vigilants
pour accorder vos positions et présenter un front uni.
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Les 10 commandements du parent d'adolescent et conclusion |
- Tu ne poseras pas de questions au petit déjeuner
il ne répondrait pas ... ou mal.
- Tu ne le harcèleras pas avec son avenir
cela l'inquiète déjà, parle lui plutôt
d'amour, ça l'intéresse.
- Tu mettras en valeur ses comportements positifs
cela le valorise, il en a besoin.
- Tu tiendras ferme sur l'essentiel, tu lâcheras du lest
sur le secondaire
il saura ce à quoi tu tiens vraiment.
- Tu ne lui répondras pas du tac au tac dans les cas
difficiles
cela calme le jeu et tu as le droit de réfléchir.
- Tu respecteras son silence sans provoquer ses confidences
il a droit à son jardin secret.
- Tu seras persuadé qu'il peut t'apprendre quelque chose
c'est fou ce que tu ignores ! ... dit-il.
- Tu feras amende honorable si tu t'es trompé
son sourire reviendra.
- Tu feras preuve d'humour en toutes circonstances
cela dédramatise et c'est l'arme la plus efficace.
- Tu supporteras tout, croiras tout, espéreras tout,
endureras tout
ce n'est pas un commandement, c'est un constat tiré de
l'expérience !
Comme l'auteur de ce site, en son temps, vous n'aurez sûrement
pas appliqué toutes ces recommandations (ni les précédentes)
!! ... Vous avez fait "du mieux que vous pouviez" ... personne n'a
appris à élever un enfant à l'université.
Rassurez-vous, essayez de les appliquer maintenant, il n'est jamais
trop tard pour bien faire, et votre "ado" vous en remerciera
plus tard !
Vous pouvez utilement consulter, dans notre rubrique
"Dossiers" l'interview de Philippe Jeammet, chef du service
de psychiatrie de l'adolescent et du jeune adulte à l'Institut
mutualiste Montsouris. => L'hostilité
des ados, c'est de l'attachement ainsi que la conférence
du Père D. Sonet => Comment
améliorer les relations parents-enfants.
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